Inauguré en janvier 2024 dans le parc archéologique du Caelius à Rome, le nouveau musée de la Forma Urbis abrite le gigantesque plan en marbre de la Rome antique, gravé sous le règne de l’empereur Septime Sévère, entre 203 et 211.
C’est un des documents les plus rares de l’Antiquité, un panorama unique du plan de l’Urbs, dont le public a été privé depuis un siècle puisqu’il a été exposé pour la dernière fois entre 1903 et 1924, dans le jardin du Palais des Conservateurs, sur la colline du Capitole. À l’origine, il était accroché au mur d’une salle du temple de la Paix qui, plus tard, fut intégré à la basilique Saints-Cosme-et-Damien. On peut encore voir, depuis la via dei Fori Imperiali, sur le mur de la basilique, les trous dans lesquels ont été insérées les broches en fer qui soutenaient les 150 plaques en marbre couvrant 18 mètres sur 13 : sur 235 m2 étaient subtilement gravés les 13 550 000 m2 de la ville.
Cent mille morceaux
L’histoire des fragments de la Forma Urbis, découverts en 1562 lors de fouilles de la basilique, est pleine de rebondissements. « En creusant derrière le Templum Pacis, raconte un contemporain, le cardinal Farnèse a trouvé en cent mille morceaux un mur où était sculpté le plan de Rome ; pour tenter de le reconstituer, il a fait ramasser minutieusement toutes les pierres et on lui en a déjà rapporté quatre charrettes… » L’enthousiasme suscité par cette découverte est grand, mais de courte durée. De nombreuses pièces sont perdues : après leur long séjour au palais Farnèse (1562-1741), les plaques finissent en partie brisées ou utilisées comme matériau de construction pour les jardins Farnèse sur le Tibre. Ce qu’il en restait – environ un dixième du plan original – parvint heureusement aux musées du Capitole en 1742, et le topographe Giovanni Battista Nolli, auteur du grand plan de Rome, est chargé d’agencer ces marbres. Dans le nouveau musée du Caelius (un ancien gymnase fasciste), les fragments identifiés de la Forma Urbis sont disposés au sol, à la place qui leur correspond sur le plan réalisé au XVIIIe siècle par Nolli. Protégés par un plancher de verre surélevé, ils offrent au visiteur une promenade dans le temps : voici sous nos pieds la Basilique Ulpia et le Colisée, voici le Circus Maximus et le port fluvial de Testaccio… Dans une petite salle, d’autres morceaux attendent encore leur emplacement. « La colline du Caelius, souligne le surintendant du Capitole pour les biens culturels, Claudio Parisi Presicce, a trop longtemps été une sorte de trou noir pour le public, alors qu’elle est le point de liaison essentiel entre la zone des Forums et la Voie Appienne bordée de tombes. »
Un hymne à la beauté
Le parc, où se trouvent les fondations du temple du Divin Claude, accueille de nombreux objets provenant de l’ancien Antiquarium Comunale, construit en 1883 pour abriter l’immense quantité de matériel résultant des fouilles intensives de l’époque. Disposés aujourd’hui dans un véritable musée à ciel ouvert, les vestiges en pierre sont répartis par thèmes, et le spectacle d’une telle accumulation de chapiteaux, de colonnes, d’entablements, de stèles funéraires, témoignages de siècles d’histoire, sous les cieux romains, avec le Colisée en toile de fond, constitue un hymne bouleversant à la beauté.
Daniela Fuganti, traduction Carole Cavallera
Parc archéologique du Caelius et musée de la Forma Urbis
Viale del Parco del Celio, 20 – Clivo di Scauro, 4, Rome
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