![© Éric Le Brun](https://www.actu-culture.com/wp-content/uploads/2024/07/cosquer.jpg)
En début d’année était placé l’un des derniers morceaux du fac-similé de la grotte Cosquer à Marseille. Il a été réalisé par l’artiste plasticien Alain Dalis, connu pour son implication dans la restauration de Lascaux II et dans la reproduction des panneaux des grottes Chauvet, Cosquer donc mais aussi de Shulgan-Tash en Russie. Cette copie d’un bouquetin se trouve sur le plafond de la Salle des Pingouins et complète désormais le gigantesque puzzle de la caverne sous-marine. Rencontre avec un artiste au sommet de son art.
Propos recueillis par Romain Pigeaud.
Comment avez-vous travaillé pour cette dernière reproduction ?
Avec mon équipe de l’atelier « Arc & Os » situé à Montignac en Dordogne, nous avons déjà conçu vingt-quatre panneaux ornés installés dans la réplique. En partant des relevés, je réalise d’abord une projection numérique au plafond, puis remodèle le support en béton avec des résines, et y grave enfin le bouquetin. Pour retrouver les volumes exacts, j’utilise un ciseau large et y aménage de la matière rajoutée (une résine assez souple) pour donner au trait son dynamisme ; je finalise l’ensemble avec un silex, qui offre un tracé unique. Le bouquetin a été gravé en plusieurs gestes extrêmement rapides, avec beaucoup d’assurance. Lors des reproductions, j’essaie de comprendre la chronologie du geste, la sensation que devait éprouver l’artiste. Je dois donner l’impression d’un animal créé d’un seul jet alors même que j’ai un modèle et que je sais précisément où je vais. C’est le même type de contrainte avec les tracés digitaux de la grotte Chauvet : il a fallu trouver des astuces pour les dessins dans la matière molle afin que l’on voie les bourrelets et les stries des granulés au fond, générés par le passage du doigt.
Les produits utilisés sont-ils sans danger ?
Nous avons mis au point des recettes pour imiter les différentes textures de la paroi, lisses ou granuleuses. Ces mixtures sont adaptées à l’usage que nous souhaitons – comme en cuisine avec des recettes que je ne vous dévoilerai pas ! – mais nous faisons attention aux conséquences de leur inhalation en utilisant des produits inertes, des résines presque biologiques.
Vous qui les connaissez intimement, qu’est-ce qui distingue Cosquer de Chauvet ?
Cosquer est similaire à Chauvet au niveau du support, parfois très mou, d’où l’omniprésence de tracés digités. Mais ces espaces étant fort différents, leurs réalisations le sont aussi : ainsi, à Cosquer, les figures sont plus petites ; et même si elles deviennent volumineuses quand les lieux le permettent, il n’y a pas de « grandes envolées lyriques » comme dans la grotte ardéchoise – et ce malgré la grande maîtrise des artistes. À Chauvet, ces derniers disposaient souvent de plusieurs mètres linéaires. Mais dans les deux cavités, ils ont travaillé de la même façon. Chacune a son mot à dire et Cosquer est plus intime.