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Carnavals, kermesses et joyeuses entrées : l’art flamand en liesse au palais des Beaux-Arts de Lille

Jacob Jordaens (1593-1678), Le roi boit !, vers 1638-1640. Huile sur toile, 156 x 210 cm. Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique.

Jacob Jordaens (1593-1678), Le roi boit !, vers 1638-1640. Huile sur toile, 156 x 210 cm. Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Photo service de presse. © Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles / photo : J. Geleyns – Art Photography

Le palais des Beaux-Arts de Lille explore le thème de la fête dans l’art flamand au fil d’une exposition foisonnante de près de 150 œuvres. Dans le contexte troublé des XVIe et XVIIe siècles, fêtes urbaines, kermesses, banquets, fêtes des rois sont célébrés dans les tableaux de Brueghel, Rubens, Jordaens et bien d’autres. Cet événement, qui bénéficie d’un partenariat exceptionnel avec le musée du Louvre et les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, s’inscrit dans le cadre de Fiesta, 7e édition de lille3000.

« Laissez les paysans faire leur kermesse », proclame une inscription dans La Kermesse de la Saint-Georges, l’une des premières œuvres attestées de Pieter Brueghel l’Ancien mettant en scène une fête paysanne. Datée de 1559, cette composition qui représente les réjouissances d’une communauté villageoise fut réalisée alors que le roi Philippe II d’Espagne venait de promulguer un édit pour réduire la durée de la kermesse de Hoboken près d’Anvers. Le souverain cherchait à contenir les débordements de ces journées de liesse populaire, comme l’avait déjà tenté Charles Quint par une ordonnance prise en 1531. Il manifestait ainsi depuis Madrid son pouvoir sur les Pays-Bas. Les œuvres de Brueghel qui transcrivent de manière très détaillée les coutumes locales et exaltent la liberté, voire la licence, des comportements lors des kermesses peuvent se lire comme une réponse à cet édit et comme une contestation de l’autorité espagnole. 

« Dans les Pays-Bas en proie aux désastres de la guerre de Quatre-Vingts Ans (1568-1648), les scènes de fêtes traduisent l’espoir du rétablissement de la paix. »

La dimension politique des scènes de fêtes flamandes est au cœur de la grande exposition que le palais des Beaux-Arts de Lille consacre aux représentations des célébrations aux Pays-Bas au cours des XVIe et XVIIe siècles. Distinguée par le label d’« Exposition d’intérêt national » décerné par le ministère de la Culture, elle bénéficie de prêts majeurs du Rijksmuseum, du Kunsthistorisches Museum de Vienne, du musée du Prado et de bien d’autres institutions. Des « joyeuses entrées » des souverains aux processions religieuses, des célébrations urbaines aux fêtes paysannes, des festivités publiques aux réjouissances familiales, le parcours montre toute la diversité de ces événements, et dévoile leur signification et leur symbolique profondes sous leur apparente légèreté. 

Thomas van Apshoven (1622-1664), Fête de village avec joueur de cornemuse sur un tonneau, vers 1660. Huile sur toile, 137 x 209 cm. Lille, palais des Beaux-Arts.

Thomas van Apshoven (1622-1664), Fête de village avec joueur de cornemuse sur un tonneau, vers 1660. Huile sur toile, 137 x 209 cm. Lille, palais des Beaux-Arts. Photo service de presse. © GrandPalaisRmn (PBA, Lille) / Hervé Lewandowski

Les concours de tir, un divertissement très prisé

Les puissantes guildes des archers et des arbalétriers organisaient régulièrement des concours de tir qui donnaient lieu à de grandes festivités. La plus célèbre était celle des arbalétriers de Notre-Dame à la Branche de Bruxelles. Elle prit une dimension politique à partir du moment où les gouverneurs espagnols furent invités à tirer en prenant pour cible un « papegai », perroquet en carton placé sur la flèche de l’église Notre-Dame du Sablon. Charles Quint s’était distingué en abattant l’oiseau à l’âge de 12 ans. En 1615, la participation victorieuse de sa petite-fille, l’archiduchesse Isabelle, fut amplement représentée et diffusée grâce à de nombreux tableaux. Son adresse au tir devait prouver sa capacité à gouverner les Pays-Bas. Une grande procession et des réjouissances publiques célébrèrent l’événement. La victoire de l’archiduc Léopold Guillaume entraîna de nouvelles festivités en 1651.

Les concours de tir faisaient également partie des nombreux divertissements organisés lors des fêtes villageoises, notamment lors de la Saint-Georges, et constituent une tradition encore vivace de nos jours. Le vainqueur, proclamé roi de la confrérie pour l’année, recevait diverses récompenses et distinctions. Il se voyait remettre un insigne ou un grand collier orné du papegai, à l’image de celui présenté dans l’exposition.

Antoon Sallaert (1594-1650), L’infante Isabelle abattant l’oiseau au concours de tir des arbalétriers de Notre-Dame, le 15 mai 1615 au Sablon à Bruxelles, 1616-1621. Huile sur toile, 180 x 340 cm. Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique.

Antoon Sallaert (1594-1650), L’infante Isabelle abattant l’oiseau au concours de tir des arbalétriers de Notre-Dame, le 15 mai 1615 au Sablon à Bruxelles, 1616-1621. Huile sur toile, 180 x 340 cm. Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Photo service de presse. © Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles / photo : J. Geleyns – Art Photography

De la guerre à la paix

Dans les Pays-Bas en proie aux désastres de la guerre de Quatre-Vingts Ans (1568-1648), les scènes de fêtes traduisent l’espoir du rétablissement de la paix. Les exactions des soldats contre la population sont représentées dans des tableaux retraçant des événements historiques précis, comme La Furie espagnole qui décrit les massacres lors du sac d’Anvers en 1576, et La Prise de Lierre par les Anversois et les Malinois le 14 octobre 1595, mais aussi dans de nombreuses œuvres qui montrent des dangers omniprésents, comme l’Attaque à main armée dans un bois ou la Scène de guerre et d’incendie de Gillis Mostaert. Des tableaux conçus en pendant opposent scènes de violence et de festivités, comme les deux grandes toiles de David III Ryckaert, réalisées un an après le traité de Münster en 1648. Le Chagrin des paysans, présentant des villageois malmenés par des soldats qui ont mis le feu à leurs chaumières, répond à La Joie des paysans célébrant le retour de la paix et de la prospérité.

Pieter Brueghel le Jeune (1564-1638), L’arbre de mai, 1620-1630. Huile sur bois, 50,5 x 75,2 cm. Genève, musée d’Art et d’Histoire.

Pieter Brueghel le Jeune (1564-1638), L’arbre de mai, 1620-1630. Huile sur bois, 50,5 x 75,2 cm. Genève, musée d’Art et d’Histoire. Photo service de presse. © musée d’Art et d’Histoire, Ville de Genève, photographe : Bettina Jacot-Descombes

Druon Antigone, l’effrayant Géant d’Anvers

Parmi les œuvres les plus imposantes de l’exposition figure la tête de Druon Antigone, réalisée en papier mâché et véritables cheveux vers le milieu du XVIe siècle. Elle appartient à la tradition des Géants, figures folkloriques liées à l’identité des villes flamandes, comme Lydéric et Phinaert à Lille, Reuze Papa et Reuze Maman à Cassel ou la famille Gayant à Douai. Ces figures participent encore aujourd’hui aux fêtes populaires et en particulier aux défilés de carnaval.

Selon la légende, Druon Antigone terrorisait les voyageurs qui s’apprêtaient à traverser l’Escaut, jusqu’au jour où le soldat romain Silvius Brabo lui coupa la main et la jeta dans le fleuve, ce qui serait à l’origine de l’étymologie de la ville d’Anvers (Antwerpen). Ce personnage destiné à effrayer l’assistance incarne la force brutale et primitive, à laquelle s’oppose l’autre figure de géant, Pallas Athéna, symbolisant la raison et la civilisation. Sa tête animée « remuait les yeux d’une façon qui faisait frémir les spectateurs », rapporte Juan Cristobal Calvete de Estrella. Ce gentilhomme espagnol relate les festivités données en 1549 en l’honneur du prince Philippe, fils de Charles Quint, au cours desquelles le terrible géant, après avoir montré sa force, finit par se soumettre et faire allégeance au souverain espagnol. Druon Antigone apparaît à de multiples reprises sur des tableaux représentant les ommegangs d’Anvers. Il contribua à forger l’identité de la ville, tout comme le navire de commerce et la baleine qui manifestaient la puissance maritime de la cité.

D’après Pieter Coecke van Aelst (1502-1550), Tête du géant Druon Antigone, 1534. Papier mâché, bois, métal et cheveux, 197 x 87 x 191 cm. Anvers, collection MAS – Museum aan de Stroom.

D’après Pieter Coecke van Aelst (1502-1550), Tête du géant Druon Antigone, 1534. Papier mâché, bois, métal et cheveux, 197 x 87 x 191 cm. Anvers, collection MAS – Museum aan de Stroom. Photo service de presse. © Collection Ville d’Anvers – MAS

Les cérémonies urbaines

La symbolique de la guerre est fréquemment reprise dans les somptueux décors élevés pour les « joyeuses entrées » lors desquelles les villes accueillaient solennellement leurs souverains, tout en manifestant leur puissance par des cérémonies grandioses. Une des sections les plus spectaculaires de l’exposition met en scène des peintures réalisées pour ces constructions éphémères qui ont rarement été conservées. Elle réunit les esquisses des arcs de triomphe conçus par Rubens, ainsi que les œuvres exécutées par les peintres de son atelier, et parfois retouchées par le maître en personne, qui ornaient les immenses constructions édifiées pour célébrer l’entrée à Anvers le 17 avril 1635 du nouveau gouverneur des Pays-Bas, le cardinal-infant Ferdinand de Habsbourg, frère de Philippe IV d’Espagne. Préservées en raison de leur qualité, elles représentaient de grandes figures allégoriques comme la Libéralité et la Providence, mais aussi des portraits des empereurs Charles Quint et Maximilien, et des précédents gouverneurs des Pays-Bas, les archiducs Ernest et Albert et l’archiduchesse Isabelle. Médailles et albums commémoratifs permettaient de transmettre le souvenir de ces journées de fêtes qui voyaient se succéder cortèges, processions, mais aussi spectacles et divertissements auxquels toute la ville prenait part.

« Le bon ordonnancement du cortège manifestait la cohésion de l’ordre social, tandis que les géants et les figures allégoriques des chars exprimaient l’identité de la ville. »

Trois ans plus tard, la ville d’Anvers confia à Rubens la conception d’un char de triomphe afin de célébrer la victoire de Kallo remportée par le cardinal-infant. Ce véhicule, chargé de trophées, de Victoires et d’autres allégories célébrant le gouverneur des Pays-Bas, figura lors de l’ommegang, grande procession religieuse et civique à laquelle participaient les édiles, les magistrats, les membres du clergé et de toutes les corporations. Le bon ordonnancement du cortège manifestait la cohésion de l’ordre social, tandis que les géants et les figures allégoriques des chars exprimaient l’identité de la ville. Dans les tableaux, souvent de très grand format, qui représentent les ommegangs de Bruxelles et d’Anvers ou les scènes de carnaval, le nombre impressionnant de personnages, de toutes les conditions sociales, symbolise la vitalité de la cité.

Pieter Paul Rubens (1577-1640), Esquisse du char de triomphe de Kallo, 1638. Huile sur bois, 103 x 71 cm. Anvers, Musée royal des Beaux-Arts.

Pieter Paul Rubens (1577-1640), Esquisse du char de triomphe de Kallo, 1638. Huile sur bois, 103 x 71 cm. Anvers, Musée royal des Beaux-Arts. Photo service de presse. © Hugo Maertens, Musée royal des Beaux-Arts d’Anvers – Collection Flemish Community

Un étonnant « gobelet à surprise »

Également appelé « gobelet à moulin », ce « gobelet à surprise », prêté par le musée de l’Hospice Comtesse de Lille, constituait un élément de divertissement très prisé lors des banquets de fête. Les convives devaient mettre en mouvement les ailes du moulin au moyen du sifflet, puis vider la coupe avant qu’elles ne s’arrêtent. Le décor parfois burlesque de ces œuvres de luxe pouvait donner lieu à des plaisanteries. Mais il prend ici une dimension politique. La représentation d’un meunier chassant un intrus coiffé d’un casque espagnol renvoie explicitement aux révoltes contre la domination du roi d’Espagne.

Pays-Bas méridionaux, « gobelet à surprise », appelé aussi « gobelet à moulin » ou, en néerlandais, « Molenbeker », XVIIe siècle. Argent, or et verre, H. 23 cm. Lille, musée de l’Hospice Comtesse.

Pays-Bas méridionaux, « gobelet à surprise », appelé aussi « gobelet à moulin » ou, en néerlandais, « Molenbeker », XVIIe siècle. Argent, or et verre, H. 23 cm. Lille, musée de l’Hospice Comtesse. Photo service de presse. © Frédéric Legoy – musée de l’Hospice Comtesse / Ville de Lille

Noces et fêtes villageoises

Plus encore que les représentations des festivités urbaines, les tableaux de kermesses et de noces villageoises finirent par forger une image symbolique des Pays-Bas. Très appréciés des amateurs d’art dans toute l’Europe, ils formèrent un genre pictural à part entière. Les œuvres des Brueghel et de David Teniers le Jeune, mais aussi de Matthijs Schoevaerdts, Hans Bol, Pieter Bout, Gillis van Tilborgh et Thomas van Apshoven réunies dans l’exposition forment une célébration truculente de la vie, qui se teinte parfois de moralisme contre les excès et les dérèglements. Les détails triviaux et parfois même scatologiques cachés dans certaines toiles rappellent l’importance régulatrice des fêtes qui permettaient de renverser l’ordre établi pendant une journée. La description minutieuse des jeux, des concours et des rites, comme celui de l’arbre de mai, témoigne de l’importance sociale de ces célébrations qui fédéraient toute une communauté villageoise. Ces représentations vont de la caricature, comme le Repas de noces burlesque de Frans Verbeeck, à l’idéalisation de la vie rurale avec Les Noces paysannes en présence des archiducs Albert et Isabelle, commandé à Jan Brueghel l’Ancien par les gouverneurs des Pays-Bas pour leur palais de Bruxelles. Cette toile présente une vision idyllique de la société où règnent la paix et la prospérité dues au bon gouvernement des archiducs espagnols. Elle offre un saisissant contraste avec Le Roi boit ! de Jordaens qui marque la fin de l’exposition. Cette version parodique des fêtes princières décrit ouvertement les excès et les dérèglements entraînés par l’ivresse. Le peintre se serait lui-même représenté sous les traits d’un convive au premier plan et aurait dépeint son beau-père Adam van Noort sous la figure du roi de la fête de l’Épiphanie. Cette scène de genre, traitée avec la maestria d’une peinture d’histoire, est confrontée à des tableaux soulignant l’élégance des bals et des festins de la cour de Bruxelles. Une table dressée qui présente de la vaisselle de luxe évoque enfin l’atmosphère de ces fastueux banquets.

Alexander van Bredael (1663-1720), Ommegang avec le géant Druon Antigone sur le Meir, 1697. Huile sur toile, 106,5 x 136 cm. Lille, musée de l’Hospice Comtesse.

Alexander van Bredael (1663-1720), Ommegang avec le géant Druon Antigone sur le Meir, 1697. Huile sur toile, 106,5 x 136 cm. Lille, musée de l’Hospice Comtesse. Photo service de presse. © GrandPalaisRmn / Stéphane Maréchalle

Brueghel et Van Balen, une fructueuse collaboration artistique

À l’occasion du 400e anniversaire de la mort de Jan Brueghel l’Ancien, le musée départemental de Flandre rend hommage à cet insigne maître de la peinture flamande, tout en faisant redécouvrir l’œuvre de son principal collaborateur, Hendrick van Balen.

Appelé « Brueghel de Velours » en raison de sa touche veloutée, Jan Brueghel l’Ancien (1568-1625) mena une brillante carrière à Anvers. Fils de Pieter Brueghel l’Ancien, il se spécialisa dans la peinture de fleurs et de paysages. Parmi les prêts majeurs de l’exposition, deux tableaux conservés au Kunsthistorisches Museum de Vienne, Paysage de montagne avec la tentation du Christ et Paysage avec saint Fulgence, montrent l’extrême finesse de sa manière qui allie la précision botanique au traitement virtuose des jeux de lumière dans les frondaisons des arbres et les perspectives atmosphériques bleutées.

Il établit à partir de 1600 une intense collaboration artistique avec son confrère et ami Hendrick van Balen (1573/1575-1632), reconnu pour l’élégance de ses figures. Tombé dans l’oubli, ce peintre (qui fut le premier maître de Van Dyck) était pourtant de son vivant aussi renommé que Rubens. La restauration récente de plusieurs de ses grandes compositions religieuses, notamment Le Baptême du Christ (musée M de Louvain), ainsi que de nouvelles attributions comme la série des Sept Douleurs de la Vierge (cathédrale Saint-Sauveur de Bruges) et la Danaé (musée d’Art et d’Histoire de La Rochelle) ont permis de mettre en lumière sa manière raffinée, mêlant influences flamandes et italiennes.

Hendrick van Balen (1573/1575-1632) et Jan Brueghel l’Ancien (1568-1625), Les Noces de Thétis et de Pélée avec Apollon et le concert des Muses, vers 1618. Huile sur cuivre, 77 x 104 cm. Paris, musée du Louvre, département des Peintures.

Hendrick van Balen (1573/1575-1632) et Jan Brueghel l’Ancien (1568-1625), Les Noces de Thétis et de Pélée avec Apollon et le concert des Muses, vers 1618. Huile sur cuivre, 77 x 104 cm. Paris, musée du Louvre, département des Peintures. Photo service de presse. © GrandPalaisRmn / Gérard Blot

À une époque où les œuvres à plusieurs mains étaient particulièrement prisées, comme gages d’extrême perfection artistique, les deux peintres réalisèrent ensemble près de quatre-vingts tableaux. L’importance de leurs interventions respectives variait selon les cas. Brueghel se limita à peindre une corbeille de fleurs pour le Pluton enlevant Proserpine exécuté par Van Balen, tandis que dans leurs nombreuses séries des allégories des Éléments, des Saisons et des Sens, les quelques figures de Van Balen sont presque éclipsées par les animaux, les végétaux et le paysage réalisés par Brueghel. Dans d’autres compositions, comme Le Festin des dieux (musées d’Angers) ou Les Noces de Thétis et de Pélée (Fondation Salavin-Fournier, abritée à la Fondation de France), l’intégration parfaite des figures avec le paysage et les éléments de nature morte montre à quel point les deux artistes travaillaient en étroite concertation. Cette harmonie resplendit dans le nouveau genre de tableau de dévotion que Brueghel et Van Balen mirent au point : une composition florale entourant la Vierge à l’Enfant. La perfection atteinte dans la représentation des fleurs exaltant les vertus mariales du somptueux tableau prêté par le musée du Prado se retrouve dans l’éblouissante profusion de la Guirlande de fruits entourant une représentation de Cybèle recevant les cadeaux des allégories des Quatre Saisons (Mauritshuis, La Haye) d’une exceptionnelle richesse iconographique. Interrompue brutalement par la mort de Brueghel emporté par le choléra en 1625, la fructueuse collaboration avec Van Balen fut reprise par son fils, Jan Brueghel le Jeune, sans toutefois parvenir au même degré d’excellence.

Hendrick van Balen et Jan Brueghel l’Ancien, Guirlande de fruits entourant une représentation de Cybèle recevant les cadeaux des allégories des Quatre Saisons, 1620-1622. Huile sur bois, 106,3 x 69,9 cm. La Haye, Mauritshuis.

Hendrick van Balen et Jan Brueghel l’Ancien, Guirlande de fruits entourant une représentation de Cybèle recevant les cadeaux des allégories des Quatre Saisons, 1620-1622. Huile sur bois, 106,3 x 69,9 cm. La Haye, Mauritshuis. Photo service de presse. © Mauritshuis, The Hague

« Brueghel & Van Balen, artistes & complices », jusqu’au 28 septembre 2025 au musée départemental de Flandre, 26 Grand’Place, 59670 Cassel. Tél. 03 59 73 45 60. www.museedeflandre.fr

Catalogue, coédition musée départemental de Flandre / Snoeck, 216 p., 35 €.

« Fêtes et célébrations flamandes. Brueghel, Rubens, Jordaens… », jusqu’au 1er septembre 2025 au palais des Beaux-Arts, place de la République, 59000 Lille. Tél. 03 20 06 78 28. www.pba.lille.fr

Catalogue, GrandPalaisRmn Éditions, 208 p., 39 €.