Le musée d’Orsay accueille dans ses collections deux portraits d’enfants nés au XIXe siècle : un tondo peint par Jean-Léon Gérôme (1824-1904) et un portrait en pied de Fernand Pelez (1848-1913) témoignant de l’indigence enfantine.
L’Enfant au masque et Misère avaient pu être admirés en mars dernier, lors de la dernière TEFAF de Maastricht, sur le stand de la Gallery 19C installée à Westlake (Texas). Longtemps restée inconnue et jamais exposée par l’artiste, la toile de Gérôme ne s’est retrouvée sur le marché de l’art que dans les années 1990.
L’innocence de l’enfance ?
Le jeune garçon toise le spectateur d’un air placide et d’une moue dédaigneuse. Drapé d’une ample étoffe émeraude, armé d’un glaive en bois et coiffé d’un masque aux traits grecs sur lequel des serpents s’emmêlent dans une chevelure vermillon, l’enfant se mue héros. On songe, bien sûr, à Persée, vainqueur de Méduse. Cette œuvre dépasse pourtant le simple sujet mythologique académique ou le portrait « en travesti », si cher au XVIIIe siècle : le contraste entre le regard posé du garçon et l’expression outrée du masque n’interroge-t-il pas l’innocence de l’enfance ?
Le naturalisme social selon Pelez
Artiste exposé, médaillé, salué et collectionné par l’État de son vivant, Fernand Pelez souffre pourtant dès sa disparition d’un rapide désintérêt. Le musée d’Orsay ne conservait jusqu’à présent aucun tableau de la main de ce tenant du naturalisme social de la fin du XIXe siècle, chantre de la pauvreté et du Paris populaire ; fleuron de la fabuleuse collection Hays, la première pensée de l’artiste pour Grimaces et Misères : Les Saltimbanques (Paris, Petit Palais) est cependant destinée à gagner les cimaises du musée par donation. Intitulée Misère, la toile récemment acquise met en scène un garçonnet aux pieds nus et sales, flottant dans des vêtements rapiécés trop grands pour lui, fixant la rue d’un regard inexpressif traduisant sa résignation. Présentée au Salon de 1886 et admirée pour son sujet, sa composition et le réalisme minutieux du peintre, elle fait partie d’une série dépeignant la misère des gamins des rues parisiennes.
Gaspard Douin