Thierry Le Saëc et les éditions de la Canopée
Les belles destinées obéissent à une logique secrète. C’est parce qu’il voulait être poète que Thierry Le Saëc est devenu peintre. Et c’est parce qu’il est un peintre épris des mots qu’il est devenu éditeur…
Né en 1957 à Lanester dans le Morbihan, Thierry Le Saëc se souvient avoir eu accès, à 13 ans, à une anthologie de la poésie française du XVIe siècle. D’emblée, les mots de Ronsard, de Du Bellay, de Marot lui parlent. Et il est subjugué par la liberté amoureuse et les vers de braise de Louise Labé (il publiera un de ses poèmes dans la revue La Canopée n° 5). S’ouvre devant lui un chemin de liberté que vont élargir ses lectures d’Éluard, d’Aragon, de Norge, de Neruda. Et puis il y a un poète qui va l’accompagner toute sa vie, c’est Eugène Guillevic, le chantre de Carnac, l’explorateur de Terraqué, l’ennemi déclaré de la métaphore au profit du « creusement » du réel et de l’Étier universel. Thierry Le Saëc est trop loin de Paris pour oser le solliciter. Mais à la mort du poète, en 1997, il rencontre son épouse, Lucie Albertini, qui lui confie maints inédits appelés à être le florilège de sa future maison d’édition, la Canopée, qui naîtra en 2002.
« Thierry Le Saëc, qui a beaucoup appris au cours de ces compagnonnages, veut […] être le maître d’œuvre de ses propres livres. La création des éditions de la Canopée, en 2002, lui permet de sauter ce pas essentiel […]. »
Poète secret
Depuis longtemps, Thierry Le Saëc écrit et élabore dans un certain secret une œuvre de poète. Ses premiers textes semblent dater de 1978 (il a 21 ans), année où il publie, aux éditions Saint-Germain-des-Prés, Trois paroles contre la mémoire en sommeil. Est-ce là une façon de recourir au réel bien présent (la « rugueuse réalité » disait Rimbaud), en opposition aux faiblesses de la mémoire ? En 1989, il ose sa première publication d’un véritable livre d’artiste, en prenant appui sur son œuvre de plasticien. Il vient alors de découvrir la gravure dans l’atelier animé par Paul Mahé à Hennebont. Et c’est justement dans une imprimerie d’Hennebont qu’il assortit de huit eaux-fortes ses poèmes regroupés sous le titre Éloge de l’ombre. Le graveur semble pousser le poète un peu introverti à s’extérioriser. Les poèmes sont imprimés en offset sur un beau vélin d’Arches, mais l’impression déçoit tellement Thierry Le Saëc qu’il s’oppose à sa mise en vente. Il aura dès lors le souci constant d’être un bon imprimeur en s’appuyant sur les ressources de la typographie, de son corpus de règles et de savoirs et toute autre technique d’impression qui respecte cette exigence. Ce qui frappe dans les premières gammes poétiques de Le Saëc est le goût des contrastes (dont sa peinture est également porteuse). L’ombre mérite éloge dans la mesure où elle met le mieux en relief la lumière. Lorsque la nuit s’éloigne, elle « offre au matin / La gloire de la rosée » et fomente bientôt des « incendies de lumières ». Il y a même une Innocence de l’ombre, titre d’un nouveau livre d’artiste publié en 1994 aux éditions de l’Atelier. Cette fois, le poème est escorté par une eau-forte en couleurs de Thierry Le Saëc, une autre de Jean-Claude Le Floch, une peinture de Jean-Pierre Baillet et une photographie de Benoît Kuhn. Le poète s’entoure d’une équipe d’amis dans des disciplines diverses. L’ombre s’inverse le matin en un drap qui : « Brûle dans l’armoise Comme un morceau De ciel blanc ». Et ce blanc a le charme de « Tout le bleu de l’aube ».
« Celui qui s’est évertué à parfaire sa technique d’artiste du livre se sent prêt à tenir compagnie à d’autres poètes, à répondre à d’autres voix et à travailler “en colimaçon” autour d’elles. »
En 1995, Le Saëc recourt à 16 de ses eaux-fortes pour accompagner, aux éditions de l’Atelier, un court texte intitulé L’Éphémère séjour des eaux. Le poème aspire à être une « hâtive ode à la brièveté de l’aube ». Le Saëc a le souci de laisser « le ciel à son désordre de sable de sel et de douleurs ». Dans cette logique, ses eaux-fortes minimalistes s’assortissent de quelques traits, lignes et signes, et font songer à la peinture de Tal Coat. L’artiste se livre à une suite, quand le poète se concentre sur une prose brève disposée en pavé. Le secret est levé : le peintre a le pouvoir de décliner librement ce que le poète n’offre que dans un élan éphémère. La même année, Le Saëc donne, chez le même éditeur, Matin, un bref poème accompagné par une eau-forte, un monotype et une pointe-sèche. Il déploie son habileté technique tout en tournant le dos à la thématique trop réductrice du matin bénéfique, puisque : « Dans la jubilation de la rosée La lumière s’offense Et se refuse au matin ». Celui qui s’est évertué à parfaire sa technique d’artiste du livre se sent prêt à tenir compagnie à d’autres poètes, à répondre à d’autres voix et à travailler « en colimaçon » autour d’elles.
Manifeste
« L’illustration, gravure, peinture, photographie, images numériques ou virtuelles ou toute autre technique, doit d’abord s’inscrire dans un dialogue vivant avec le texte. Ce dialogue peut être fait de connivence, de sensualité mais aussi il peut être rude, violent et perturbateur. Image et écrit, aucun asservissement de l’un à l’autre. Ce qui me passionne dans le livre d’artiste est la recherche de ce troisième corps qui serait le lieu même du livre, plus tout à fait le corps du peintre ni celui du poète ou de l’écrivain, un corps autonome qui revendiquerait sa place et la nécessité de sa présence. Une effraction créatrice dans l’intimité de chacun des protagonistes pour faire surgir l’espace du livre. » Thierry Le Saëc, 1996
Graver la marée montante
Le véritable départ pour Thierry Le Saëc, graveur et architecte du livre, a lieu en 1996 avec Marée montante avant le jour. Le poème de Jacques Gaucheron correspond bien aux aspirations de l’artiste qui n’a cessé d’osciller entre le recours à la lumière et le désir de conserver à l’ombre son halo de mystère. Jacques Gaucheron valorise justement : « Un creusement furtif de blanche écume celle qui naît des vagues » et Thierry Le Saëc peut dès lors dresser, en miroir, une vague somptueuse, cernée de rouge. Le mouvement est donné. La main du graveur « donne à voir » (comme le disait Éluard dont Gaucheron fut l’ami proche) le déroulé d’un monde qui inclut la mer et ses amers. D’un même mouvement, Le Saëc arrive à cristalliser autour de lui des chantres de la Bretagne qui sont sensibles à l’œuvre de Guillevic, notamment Alain Jégou, véritable marin pêcheur. Dans les poèmes de ce dernier, la mer emplit les pages « à tous les étages », et c’est une fête qui s’épand jusqu’« à l’éperdu des songes ». Jacques Gaucheron continue, lui, de traquer la « lumière du chant », tandis que la terre devient insulaire dans les poèmes d’Alain Le Beuze. En sa compagnie, les gravures de Le Saëc aspirent à traduire « l’intranquillité du monde ».
Mais, si notre artiste est sensible à la voix atlantique (« intranquille » comme la qualifiait Pessoa), il a également besoin de l’évidence sereine qui émane du monde méditerranéen. Le poète montpelliérain Pierre Torreilles la lui apporte, et Le Saëc conçoit L’Envol de la chouette, en 1998, comme une composition musicale. Dans une lettre adressée le 18 août 1997 à Le Saëc, Torreilles vante « la cuvette de ces tailles concises et veloutées » qui « donne son volume à l’amplitude vibratoire de l’ouvrage ». Le minimalisme qui meut le geste de Le Saëc lui donne une ampleur nouvelle. À la vague pleine et spectaculaire du beau livre de Gaucheron (toute la puissance d’un Hokusai venait en rappel), répond ici le geste bref qui caresse la peau d’un espace. L’artiste prend de plus en plus goût à se confronter à des univers différents. Pierre Torreilles lui a appris le paradoxe qui veut que « s’illimite ce qui nous cerne ». Le poète Thierry Le Saëc participe du même esprit dans un autre livre pleinement sien, Incandescence de l’eau (en 1999) avec six peintures contrecollées. L’illustration n’en appelle plus à la simple gravure ; elle s’appuie sur des peintures originales, plus libres, plus improvisées : « ici l’air vacille et la voix se déchire ». Thierry Le Saëc se tourne vers les poètes Paol Keineg et Erwann Rougé, puis il s’associe avec Dominique Sampiero dans un magnifique Rouge de rivière où il n’hésite pas à pratiquer le collage et la déchirure. Et le voilà qui, en 2001, œuvre avec deux des plus grands écrivains français : Charles Juliet dans La Vague, où deux pointes-sèches et une peinture contrecollée traduisent « la lumière avivée / de l’immense / qui t’accueille », et Bernard Noël dans La Fable et le vent, où un « venteux couteau » tranche « le verbe dans la gorge ». Ces beaux livres sont réalisés chez différents éditeurs (Fata Morgana, Dana, Unes) en marge des éditions de l’Atelier.
Naissance des éditions de la Canopée
Thierry Le Saëc, qui a beaucoup appris au cours de ces compagnonnages, veut désormais être le maître d’œuvre de ses propres livres. La création des éditions de la Canopée, en 2002, lui permet de sauter ce pas essentiel, en compagnie d’un texte capital que Guillevic a écrit les 13 et 14 janvier 1995, deux ans avant sa mort, intitulé Vivre en profondeur. Les « choses que nous jugeons mineures » peuvent se révéler « essentielles », écrit Guillevic, que Le Saëc voudrait escorter dignement. Il tâtonne longuement jusqu’à ce qu’un de ses nouveaux auteurs, Antoine Graziani, lui envoie de Londres une carte postale reproduisant Saint François d’Assise en méditation de Zurbarán. Pour accompagner Guillevic, Thierry Le Saëc se met dans la position humble de saint François et use de quelques traits qui sont le salut bref de l’admiration.
La Canopée va accorder une place royale à d’autres textes manuscrits de Guillevic (Jean Tortel et Angle aigu en 2007 ; Qui frappe ? en 2012 ; Toujours en 2014 avec l’accompagnement magistral de Loïc Le Groumellec) ou à des ensembles d’études consacrés au poète. La Canopée accueille maints poètes, dont Charles Madézo, Henri Droguet (Champ du signe ouvre la voie en 2003 – et c’est vraiment « fête / à chanter rigodons et lubies »), Daniel Kay (des dessins sérigraphiés et un original pour Magnificat, en 2003), Alain Le Beuze, Bernard Chambaz et encore une fois Bernard Noël, en 2004, à partir de son célèbre poème L’Ombre du double (POL, 1993) qui a déjà suscité de nombreux livres d’artiste avec, notamment, Colette Deblé, Bertrand Dorny et Olivier Debré. Thierry Le Saëc relève à son tour le défi en s’associant, à la pointe-sèche, avec Véronique Ricci. Il se souvient fort à propos qu’il fut le poète de l’ombre, et ses gravures semblent participer du « halètement » « dans la durée de l’os » – pour reprendre les mots de Bernard Noël. À mesure qu’il multiplie les publications, Thierry Le Saëc se livre à d’infinies variations. Il aime mêler, dans un même livre, peintures ou dessins originaux à des gravures. Il fait appel à des photographes et confectionne lui-même des impressions ou images numériques qu’il présente telles quelles ou qu’il rehausse de peintures. Son goût du mélange l’incite à convier des musiciens dont le trompettiste Jean-Luc Cappozzo ou le compositeur Jean-Yves Bosseur. On le voit introduire ici et là des monotypes et des estampages. Son habileté technique est évidente, mais aussi le souci de préserver sa palette de peintre. C’est dans cet esprit qu’il participe en 2006 à un ouvrage qui ne propose que des œuvres originales de peintres affirmés comme Claude Viallat, Albert Ràfols Casamada ou Guy Le Meaux, dont l’auteur qui les a réunis, Antoine Graziani, s’attache à détecter les Similitudes (édité par la galerie Annie Lagier de L’Isle-sur-la-Sorgue). Dès 2005, Le Saëc accompagne François Rannou en marge de Tréguennec, un poème totalement manuscrit qui fait partie des collections du « livre pauvre ». Des pastels de tonalité jaune, bleue et rouge escortent la plume du poète, libérée des contraintes de l’imprimerie. En 2009, Thierry Le Saëc prend l’initiative de confectionner luimême, pour la collection des « livres pauvres » (manuscrits, originaux et hors commerce), onze partitions articulées autour de ses interventions graphiques. Lignes nomades et pistes s’entrecroisent pour mieux forcer les impasses, « entre éveil et brisure », comme le souligne une des onze poètes invités, Jacqueline Saint-Jean.
Lancement d’une revue et élargissements en cascade
Thierry Le Saëc aime ordonner son travail. Ainsi crée-t-il en 2004 une revue qui porte le titre même de ses éditions, La Canopée, et doit obéir au rythme de deux numéros par an. C’est, dit-il, le « réceptacle de textes en attente éventuellement de livres futurs » et « une façon d’engager un premier dialogue » avec des auteurs qui lui ont adressé des textes et de songer à des « mariages » possibles avec des peintres aussi divers que Claude Viallat, Janos Ber, Philippe Hélénon, Yves Picquet, Hélène Durdilly, Pierre Buraglio, Frédérique Lucien, Bernard Moninot, Gilles du Bouchet et Thierry Le Saëc lui-même. Tirée à 30 exemplaires, la revue joue donc le rôle d’un pont. De 2006 à 2010, les éditions accordent une place de choix à Guillevic, à Georges Perros (Le Cimetière de Tréboul est un bel hommage collectif se référant au lieu où l’auteur de Papiers collés a été mené en terre) et restent fidèles à Bernard Noël (Et maintenant dis-tu vient, en 2007, saluer les 77 ans du poète). Elles s’attachent à la poésie montante, convient des auteurs comme Daniel Kay, Jean-Pierre Chevais et Denise Le Dantec (dont Castalia a été relié par Paula Saint-Hillier). Thierry Le Saëc tisse des liens forts avec Jean-Paul Michel et Patrick Wateau. La poésie étrangère fait une entrée remarquée, en 2007, avec les Coquelicots en juillet de Sylvia Plath, la déchirante poète américaine traduite par Philippe Denis.
« La poésie étrangère fait une entrée remarquée, en 2007, avec les Coquelicots en juillet de Sylvia Plath, la déchirante poète américaine traduite par Philippe Denis. »
À partir de 2011, les ouvertures vont se multiplier. Thierry Le Saëc cède volontiers sa place d’« illustrateur » à d’autres. C’est là une bonne façon de mieux actionner le gouvernail de l’éditeur. Le poète Didier Cahen introduit le peintre Claude Garache dans 3 jours, avant que Garache ne fasse duo avec Michael Edwards dans Buissons magiques. Daniel Biga arrive avec Claude Viallat. Sous le titre Cool heurts barococo, la plume du poète se coule et s’écoule, attentive à ce que « couleur se mange » – ce qui pousse le peintre à offrir de généreuses coulées colorées où le centre blanc de la page est néanmoins préservé de heurts trop baroques. Cool, mon coco ! François Morellet fait son entrée à la Canopée l’année suivante. Il propose une étonnante sérigraphie qui tourne autour d’un texte de Guillevic intitulé Plan, pour lequel l’artiste a imaginé « une œuvre infinie » composée d’« un zigzag très spécial » où les segments de droite ne sont jamais réunis par un angle identique mais par des angles qui s’ouvrent et se ferment librement. De ce « zigzag déglingué », il pourra dire : « Cette géométrie systématique et frivole est celle que j’aime et pratique depuis toujours. » En 2013, le poète Pierre Chappuis attire Gilles du Bouchet dans Torrent, cette foule, et Guillevic réapparaît avec Du noir en compagnie de Léon Wuidar. En 2014 sortentToujours de Guillevic (eau-forte de Loïc Le Groumellec), Fin’amor hareng saur de Patrick Wateau (cinq linogravures de Thierry Le Saëc), À travers le Tarn de Kenneth White (cinq dessins originaux de Le Saëc). Le peintre aime de plus en plus osciller entre l’original et le multiple, et son compagnonnage avec des artistes-frères comme Du Bouchet et Le Groumellec le pousse à toujours plus de liberté. Et puis, il y a Affaires de formes qui, à partir d’un texte de James Sacré, permet à Claude Viallat d’offrir un leporello de 15 m de long et deux peintures de 1,5 m chacune, où la vie bat en jaune et vert tandis que s’infiltrent des modulations qui courent du rose au rouge le plus vif ou du bleu tendre au bleu tendu de l’effroi. C’est comme si deux tapisseries se déployaient pour montrer que les formes sont finalement une affaire de couleurs.
Du dessin au dessein
Thierry Le Saëc continue à s’entourer de nombreux complices comme Dominique Grandmont, Mathieu Nuss, Yves Peyré, Esther Tellermann, Tita Reut, Sophie Braganti, Claire Le Cam – pour ne citer que quelques noms. Il recourt, le plus souvent, à l’original ou aux bois gravés. Il a aussi l’idée audacieuse d’inviter pas moins de quatorze peintres à escorter les Quatorze morceaux de la descente de croix de Ludovic Degroote. Une place toute particulière doit être dévolue au poète japonais Hisashi Okuyama. Né le 24 janvier 1943, Okuyama se réfère constamment au 24 janvier 1743 qu’évoque Friedrich Hölderlin, son plus profond compagnon. Il a fait de longue date le vœu d’écrire toute son œuvre en français et, dans Rose octaviation pour trois voix, il tente de redonner voix à sa mère à travers « fleurs ou douleur ».Thierry Le Saëc nous livre des traces de roses sur un claque. On traverse alors « une urne de verre, légèrement lactée par le temps », à l’ombre protectrice de Hölderlin. L’itinéraire de Thierry Le Saëc reste fidèle à sa ligne première. Poète, il continue à donner quelques textes de lui (Ouvrir, Le Nerf de l’os et, tout récemment, Poème avec une eau-forte de Le Groumellec). Quant à l’éditeur très actif, il n’entend jamais abdiquer son œuvre de peintre, ni perdre la main. Dans sa maison de Kergollaire, il y a trois espaces distincts : celui qui relève de l’édition (le choix des papiers, la découpe, la typographie, la gravure – avec, toujours, un finissage dans les magnifiques emboîtages de Jeanne Frère, à Nantes) ; celui de la revue La Canopée ; enfin l’atelier du peintre, où se côtoient toiles de grand format, dessins et « techniques mixtes ». Le Saëc a récemment publié un catalogue de dessins au fusain anglais, au graphite et à la cire. Le challenge technique lui permet de bien fixer sur le papier son trait tout en le conviant à des oscillations inquiètes que les taches noires cautérisent et élèvent dans la nuit questionneuse. On sent une admiration fidèle pour Tal Coat, mais aussi une liberté fortement enviée à des artistes aussi divers que Viallat, Morellet, Le Groumellec, Frédérique Lucien… Si les grandes toiles s’épanouissent plus volontiers dans la couleur, les dessins (notamment les 50 réalisés en janvier 2021) interrogent les modulations du noir, celles des mots souterrains. Débords et fixations s’entrecroisent dans le grand « dessein » de douer de rigueur le souffle volatil des mots. L’orchestration implique donc tous les registres – du simple trait au mot qu’il traduit et au livre qui les réunit.
« L’itinéraire de Thierry Le Saëc reste fidèle à sa ligne première. Poète, il continue à donner quelques textes de lui […]. Quant à l’éditeur très actif, il n’entend jamais abdiquer son œuvre de peintre, ni perdre la main. »
Thierry Le Saëc, éditions de la Canopée, 67, chemin Yvonne Jean-Haffen, Kergollaire, 56440 Languidic. Tél. : 06 27 12 46 64 /02 97 65 21 13, courriel : lesaecvidal@orange.fr blogs : http://lesaecthierry.blogspot.fr et http://edlacanopee.blogspot.fr
Expositions : Métamorphoses, jusqu’au 3 octobre 2021 au château de La Roche-Jagu, 22260 Ploëzal. Site Internet : larochejagu.fr ; Salon du livre rare, du 24 au 26 septembre 2021, Grand Palais Éphémère, Champ-de-Mars, 75007 Paris. Site Internet : salondulivrerare.paris ; Salon Page(s, les 26, 27 et 28 novembre 2021, Palais de la femme, 94, rue de Charonne, 75011 Paris. Site Internet : salon-pages.paris
Les éditions de la Canopée ont reçu la Bourse Arcane, décernée en juin 2021 par l’Adagp et la Société des Gens de Lettres, pour le projet de livre d’artiste La mémoire du vent, textes de Renaud Ego, sérigraphies de Bernard Moninot.