Gustave Moreau, illustrateur de Jean de La Fontaine

Études de lions (étude préparatoire pour Le Lion et le Rat), 1881, graphite, aquarelle, gouache, 19 x 27,5 cm, Paris, musée Gustave Moreau.

Études de lions (étude préparatoire pour Le Lion et le Rat), 1881, graphite, aquarelle, gouache, 19 x 27,5 cm, Paris, musée Gustave Moreau. © RMN-GP / René-Gabriel Ojéda

Le collectionneur et mécène Antony Roux, désireux de publier une nouvelle édition illustrée des Fables de La Fontaine, se met en relation avec plusieurs peintres importants de son temps, dont Gustave Moreau. Afin de répondre à l’esprit de La Fontaine, l’artiste, sans abandonner ses références à sa formation académique, va innover et chercher de nouvelles sources d’inspiration. Réalisées entre 1879 et 1884 dans l’atelier de la rue de La Rochefoucauld à Paris, 64 aquarelles voient le jour. 35 d’entre elles sont exceptionnellement exposées au musée national Gustave Moreau à partir du mois de février 2021.

Salvador Dalí, dans l’exposition « Hommage à Meissonier » qu’il organisa à l’hôtel Meurice, en 1967, montrait deux aquarelles de Gustave Moreau illustrant des fables de La Fontaine : La Mort et le Bûcheron et Du Thésauriseur et du Singe. Ces aquarelles et les 62 autres qu’avait peintes Moreau n’ont pas été montrées depuis son exposition posthume de 1906. 34 d’entre elles, actuellement conservées en mains privées, rejoignent aujourd’hui Le Paon se plaignant à Junon, feuille appartenant au musée Gustave Moreau.

Le Rat de ville et le Rat des champs, 1881, aquarelle, 30,7 x 23,4 cm.

Le Rat de ville et le Rat des champs, 1881, aquarelle, 30,7 x 23,4 cm. © Jean-Yves Lacôte

C’est donc à une exposition exceptionnelle que le public est convié grâce à la générosité de collectionneurs particuliers qui ont accepté de se dessaisir, durant quelques mois, de ces chefs-d’œuvre pour les lui faire découvrir sur les murs de l’atelier où elles ont vu le jour. Trois protagonistes sont à l’origine de cet ensemble de 64 aquarelles, qui, par ordre d’entrée « en fables », sont Jean de La Fontaine (1621-1695), Antony Roux (1833-1913) et Gustave Moreau (1826-1898). La Fontaine et son œuvre ne sont plus à présenter, même s’il n’est pas inutile de rappeler que ses fables sont bien plus nombreuses qu’on ne le croit souvent : on en compte 243, publiées en 12 livres entre 1668 et 1694. Autre détail important, elles sont pour la plupart le fruit d’une révision de textes plus anciens ; les premières font explicitement référence à l’écrivain grec Ésope, que l’on considère comme le « père de la fable », d’autres ont été empruntées à des auteurs de l’Antiquité mais aussi de la Renaissance. Et comme si l’Ancien Monde ne suffisait pas, La Fontaine est allé chercher certains de ses sujets du côté de l’Inde à travers les traductions récentes du Pañchatantra compilées par le mythique Bidpaï, qui conte, à travers 73 apologues répartis en cinq livres, l’histoire de deux chacals : Karataka et Damanaka. 

Musée Gustave Moreau, escalier de l’atelier du 2e étage.

Musée Gustave Moreau, escalier de l’atelier du 2e étage. © Hartl-Meyer

Une commande d’Antony Roux

Le deuxième protagoniste est un quasi inconnu. Théophile Amédée Antonin, qui deviendra très vite Antony Roux, est le descendant d’une vieille famille provençale qui a construit sa fortune au fil des générations et dont le père était banquier. Ne se sentant pas la fibre financière, Roux abandonna rapidement la gestion de la banque paternelle à son frère pour vivre de ses rentes. Très tôt, il rencontra les principaux peintres de sa région natale et se lia plus particulièrement avec Félix Ziem et Gustave Ricard, à qui il commanda son portrait en 1861. Il accompagna ses mentors à Paris, probablement pour visiter le Salon auquel il prêtait leurs œuvres en sa possession, et fut présenté à plusieurs peintres parisiens, notamment Jules Élie Delaunay qui, à son tour, l’introduisit dans le cénacle des ateliers. C’est à cette époque, vers la fin des années 1870, que Roux voulut ajouter une autre facette à sa collection et adjoindre à ses tableaux un ensemble plus personnel.

Gustave Ricard, Portrait d’Antony Roux, 1861, huile sur toile, Marseille, musée des Beaux-Arts.

Gustave Ricard, Portrait d’Antony Roux, 1861, huile sur toile, Marseille, musée des Beaux-Arts. © Musées de Marseille / Almodovar-Vialle

L’idée lui vint alors de commander à différents artistes des aquarelles illustrant les Fables de La Fontaine qui pourraient donner lieu à une nouvelle édition. Par l’intermédiaire de Delaunay, il entra en contact avec de nombreux artistes qui acceptèrent de produire une ou plusieurs feuilles, ses principaux fournisseurs étant Delaunay qui lui dessina 13 aquarelles, François-Louis Français ou Ferdinand Heilbuth qui en livrèrent 9, Giuseppe De Nittis, 7, ou Jules Jacquemart, 20. Tandis que ses multiples partenaires travaillaient à leurs réalisations, Roux poursuivait sa recherche de collaborateurs et fut amené par Delaunay – c’est ici qu’apparaît notre troisième protagoniste – chez Gustave Moreau, au début de 1879. L’accord entre Antony Roux et le peintre fut immédiat, une première commande fut passée et une correspondance s’engagea dont le musée de la rue de La Rochefoucauld conserve une partie, près de 200 lettres allant bien au-delà de 1884, date à laquelle Moreau a livré ses dernières feuilles. Au moment de leur rencontre, celui-ci est déjà un artiste célèbre et recherché qui s’est illustré au Salon par plusieurs tableaux de « grand genre », qui ont parfois divisé la critique mais lui ont acquis de nombreux et fidèles amateurs. Parmi eux, il est possible de citer, par exemple, le prince Napoléon, cousin de l’empereur Napoléon III, qui sera le premier propriétaire de son tableau du Salon de 1864, Œdipe et le Sphinx.Très vite après leur première rencontre, Roux lui commande deux aquarelles que Moreau lui adresse le 7 juillet 1879. La première mentionnée dans la correspondance ne représente aucune histoire en particulier mais – idée entièrement nouvelle – une Allégorie de la fable, que Gustave Moreau propose pour le frontispice de l’ouvrage. Il s’inspire d’un dessin de 1865, exposé au Salon de 1866, intitulé Une Péri, projet pour un émail (The Art Institute of Chicago) ; la figure volante, montée sur un hippogriffe, brandit ses attributs symboliques : le masque et la marotte.

Étude pour Phébus et Borée, 1879, Paris, musée Gustave Moreau.

Étude pour Phébus et Borée, 1879, Paris, musée Gustave Moreau. © RMN-GP / René-Gabriel Ojéda

La seconde aquarelle illustre Phébus et Borée, troisième fable du sixième livre. La composition est dominée par un Apollon menant son quadrige, sous lequel fuit un Borée déconfit, tandis qu’au bas de la feuille, un voyageur à l’antique, manteau sur le bras et houlette à la main, poursuit son chemin. Ces deux œuvres peuvent aisément être rapprochées des travaux qui ont fait la réputation de Gustave Moreau. Cependant, afin de répondre à l’esprit de La Fontaine et aux exigences de Roux, sans totalement abandonner les références à sa formation académique, le peintre va bientôt devoir innover et chercher de nouvelles sources d’inspiration. Après ce premier envoi, d’autres suivront sans périodicité bien déterminée, composés de 1 à 10 illustrations. Les dernières feuilles seront adressées au collectionneur dans le courant de l’année 1884. Grâce aux lettres échangées entre Roux et Moreau, et au carnet de comptes que madame Moreau mère a tenu jusqu’à peu de temps avant sa mort, en 1884 – nous révélant que, selon les envois, chaque feuille a coûté de 500 à 1 500 francs –, nous savons dans quel ordre la plupart des feuilles sont arrivées dans les mains du commanditaire. Par contre, les informations font défaut, qui permettraient d’expliquer pourquoi ces fables ont été choisies et pourquoi dans cet ordre. 

Le Loup et l’Agneau, 1882, graphite, gouache, aquarelle, 28,5 x 19,5 cm, Paris, musée Gustave Moreau.

Le Loup et l’Agneau, 1882, graphite, gouache, aquarelle, 28,5 x 19,5 cm, Paris, musée Gustave Moreau. © RMN-GP / René-Gabriel Ojéda

« La première des sources de Gustave Moreau l’oblige à se retourner vers son passé d’étudiant et de copiste, à renouer avec ses plus grands prédécesseurs, afin de leur emprunter certains éléments de ses illustrations. »

 Des sources à portée de main

La première des sources de Gustave Moreau l’oblige à se retourner vers son passé d’étudiant et de copiste, à renouer avec ses plus grands prédécesseurs, afin de leur emprunter certains éléments de ses illustrations. Le voyage effectué en Italie entre 1857 et 1859, dont les souvenirs sont présents à différents endroits du musée de la rue de La Rochefoucauld, va être convoqué à plusieurs reprises. Ainsi trouve-t-on dans l’illustration de Jupiter et les Tonnerres (livre 8, fable 20) un rappel de La Vision d’Ézéchiel de Raphaël, qu’il avait eu l’occasion de voir au palais Pitti à Florence lors de son séjour de juin à août 1858. Si cette réminiscence vieille de 20 ans s’était peut-être estompée dans son esprit – aucune copie ne figure dans son fonds d’atelier –, son impressionnante documentation a pu compenser les effets du temps ; la présence d’une photographie (non datée) d’Hippolyte Bayard et François Auguste Renard, comme en vendaient diverses galeries parisiennes, a pu raviver sa mémoire. Moreau n’ayant guère voyagé par ailleurs, les différentes écoles de peinture l’inspireront grâce à des reproductions mais aussi, plus simplement, grâce à ses nombreuses visites au Louvre.

Le Paon se plaignant à Junon, 1882, sanguine (papier report ?), plume et encre brune, aquarelle, gouache, Paris, musée Gustave Moreau.

Le Paon se plaignant à Junon, 1882, sanguine (papier report ?), plume et encre brune, aquarelle, gouache, Paris, musée Gustave Moreau. © RMN-GP / René-Gabriel Ojéda

On peut constater que de multiples emprunts aux tableaux flamands et hollandais du musée lui permettent d’animer ses compositions d’éléments variés. Ainsi en va-t-il, au centre de la table dressée que quittent précipitamment Le Rat de ville et le Rat des champs (livre 1, fable 9), du hanap de métal doré sorti d’un tableau de Jan Davidsz de Heem, Fruits et riche vaisselle sur une table (1640). Plus étonnant, la cheminée monumentale des Joueurs de cartes dans un riche intérieur, de Pieter de Hooch (vers 1663-1665), qui se retrouve dans Le Singe et le Chat (livre 9, fable 17), aquarelle livrée de même en 1881. Aux citations ponctuelles d’éléments puisés dans les œuvres de ses prédécesseurs, il faut ajouter les restitutions car Gustave Moreau ne procède pas seulement par emprunts mais aussi en s’inspirant de la technique de ses devanciers. C’est le cas Du Thésauriseur et du Singe (livre 12, fable 3), où l’avare semble vêtu comme un Hollandais du XVIIe siècle réfugié dans un antre qui n’est pas sans évoquer les tonalités fuligineuses du Philosophe en méditation peint par Rembrandt en 1632, également présenté au Louvre. L’art français un peu plus tardif exposé dans le même musée n’est pas non plus oublié, et c’est aux fêtes galantes, à Watteau, Pater ou Lancret, que renvoie l’atmosphère de certaines feuilles telle la scène illustrant Un animal dans la lune (livre 7, fable 17), où la nature comme les couples enlacés semblent un hommage à l’Embarquement pour Cythère de Watteau, peint en 1717.

« On peut constater que de multiples emprunts aux tableaux flamands et hollandais du musée [du Louvre] lui permettent d’animer ses compositions d’éléments variés. »

Enluminures persanes et indiennes

L’ensemble suivant, qui concerne les fables plus tardives de La Fontaine, inspirées par des références plus exotiques, a d’autres sources. Certaines appartiennent, bien évidemment, à la documentation personnelle du peintre et à cet irremplaçable répertoire d’images qu’était la revue hebdomadaire Le Magasin pittoresque, fondée en 1833, dont la collection se trouve encore dans la bibliothèque de la rue de La Rochefoucauld. Lorsque Roux demande à Moreau d’illustrer des fables dont on peut retrouver l’origine chez Bidpaï ou dans son avatar arabo-persan, Kalîla wa Dimna, ou bien encore dans les œuvres du poète persan Saadi connus sous le titre de Gulistan ou L’Empire des roses, les gravures de la revue sont d’un grand secours pour évoquer des contrées inconnues du peintre.

Feuille d’études pour Le Songe d’un habitant du Mogol, 1881, Paris, musée Gustave Moreau.

Feuille d’études pour Le Songe d’un habitant du Mogol, 1881, Paris, musée Gustave Moreau. © RMN-GP / Tony Querrec

Ainsi, quand il s’agit d’illustrer Le Songe d’un habitant du Mogol (livre 11, fable 4), Moreau multiplie les emprunts de détails aux gravures du Magasin pittoresque : sur une même feuille, il copie d’après un numéro de 1834 le décor de deux colonnes provenant des fouilles du site d’Ellora et leur adjoint un élément inattendu d’une autre page de la revue, en reprenant le Modèle de l’éléphant qui aurait dû orner la place de la Bastille. Quittant son atelier, Moreau se rendait également à la Bibliothèque nationale et il eut accès à un certain nombre de manuscrits et d’enluminures persanes et indiennes dont il fit des copies. De la même manière, il avait l’habitude de visiter les expositions, carnet et crayon en poche ; il put notamment dessiner certains objets présentés à l’Exposition des beaux-arts de l’Extrême-Orient qui se tint au palais de l’Industrie en 1873. Il s’agissait en réalité de pièces de la collection du banquier et collectionneur Henri Cernuschi, riche en bronzes antiques, que l’on retrouve, par exemple, dans le décor de la fable Les Deux Amis (livre 8, fable 11), inspirée de Bidpaï. 

L’Éléphant Bangkok du Jardin des Plantes, (étude préparatoire pour Le Rat et l’Éléphant), 1881, graphite sur papier-calque contrecollé, 30 x 19 cm, Paris, musée Gustave Moreau.

L’Éléphant Bangkok du Jardin des Plantes, (étude préparatoire pour Le Rat et l’Éléphant), 1881, graphite sur papier-calque contrecollé, 30 x 19 cm, Paris, musée Gustave Moreau. © RMN-GP / René-Gabriel Ojéda

Une veine naturaliste

Un autre ensemble de références, que l’on pourrait qualifier de naturalistes, est beaucoup plus surprenant au vu des créations antérieures de Gustave Moreau. Lui qui a toujours tenu à distance le paysage pur et le monde contemporain va, pour satisfaire Antony Roux, traiter des sujets uniquement paysagers comme dans Le Chêne et le Roseau (livre 1, fable 22), ou peindre des illustrations dans lesquelles le paysage tient une place majeure, comme dans Le Renard et les Raisins (livre 3, fable 11).

Le Renard et les Raisins, n. d., aquarelle, 23,5 x 18,9 cm.

Le Renard et les Raisins, n. d., aquarelle, 23,5 x 18,9 cm. © Jean-Yves Lacôte

Ici apparaît un animal, motif jusqu’alors exceptionnel dans sa peinture. Conscient de sa méconnaissance de l’anatomie animale, Moreau va tout faire pour pallier cette lacune ; ainsi, il se rend plusieurs semaines durant au Jardin des Plantes pour croquer les attitudes de ses futurs héros en se postant devant la cage du lion Brutus, l’enclos de l’éléphant Bangkok ou les volières des vautours – dont il ne nous a pas laissé les noms. Pour des animaux plus sociables et moins encombrants, il a recours à son commanditaire. Celui-ci s’adresse à un marchand d’animaux et empailleur et fait livrer à plusieurs reprises des animaux vivants à l’atelier du peintre, ce qui nous vaut cette correspondance étonnante, datable de la fin de l’année 1883 ou du début de la suivante : « Je sors de chez l’Empailleur, vrai marchand de loups ; il m’a promis que vous recevriez tous ces animaux demain matin. Ils seront vos hôtes (les heureux) pour huit jours à renouveler pour huit autres jours si cela vous est nécessaire. Quant aux grenouilles, je ne pourrai les avoir que Lundi ou Mardi – elles vivront pendant huit à dix jours, ce ne sera qu’une lente agonie, le marchand prétendant qu’il leur faut des mouches ou des vers. Cependant si pour le succès de l’aquarelle cinq ou six jours étaient suffisants (voyez à côté de la philanthropie, l’intérêt), vous pourriez les abandonner dans votre joli petit jardin – elles seraient alors soumises simplement aux lois immuables qui régissent les êtres animés. » Toutes ces références ne doivent pas faire oublier la capacité d’invention de Moreau, qui a su pousser sa réflexion bien au-delà des modèles dans une œuvre telle que Le Dragon à plusieurs têtes…, menant sa création aux limites de l’abstraction. 

Le Dragon à plusieurs têtes et le Dragon à plusieurs queues, 1880, aquarelle, 28,4 x 21,9 cm.

Le Dragon à plusieurs têtes et le Dragon à plusieurs queues, 1880, aquarelle, 28,4 x 21,9 cm. © Jean-Yves Lacôte

« Un autre ensemble de références, que l’on pourrait qualifier de naturalistes, est beaucoup plus surprenant au vu des créations antérieures de Gustave Moreau. »

Un aboutissement exceptionnel

Ces œuvres ont été visibles à deux reprises, à Paris, du vivant du peintre. Une partie d’entre elles en 1881, dans le salon de la Société d’aquarellistes à la galerie Durand-Ruel, puis en 1886 à la galerie Goupil, avant la manifestation posthume de 1906 citée précédemment. C’est surtout en 1881, au côté des aquarelles commandées par Roux à d’autres artistes, que le travail de Moreau – déjà présent avec 25 aquarelles – fut le plus commenté et le plus admiré. Mais, à la suite des commentaires qui soulignaient alors la disparité des mains et des réussites, Roux semble avoir renoncé à son projet d’ouvrage et avoir vendu une partie de sa collection qui se retrouva en 1899 à l’Hôtel Drouot, dans la vente de la collection Alfred Hartmann. Ce changement d’intention, largement compensé par la complicité qui allait le lier à Gustave Moreau, ne l’empêcha pas en 1885, sur les conseils de Goupil, de commander plusieurs eaux-fortes au graveur Félix Bracquemond d’après les aquarelles de Moreau. L’affaire tourna rapidement court, et seules six transpositions furent réalisées et présentées au Salon de 1887, tandis qu’une d’entre elles demeurait inachevée. La technique de l’aquarelle, qui avait retenu l’attention de Gustave Moreau depuis sa plus lointaine jeunesse, trouva dans cet ensemble un aboutissement exceptionnel de variété et de qualité, révélant un peintre capable de remettre en cause ses certitudes artistiques pour approcher au plus près la pensée de Jean de La Fontaine, grâce à Antony Roux, un collectionneur trop vite oublié.

Les Grenouilles qui demandent un Roi, 1884, aquarelle, 32 x 20,7 cm.

Les Grenouilles qui demandent un Roi, 1884, aquarelle, 32 x 20,7 cm. © Jean-Yves Lacôte

« Gustave Moreau. Les Fables de La Fontaine », du 12 février au 17 mai 2021, musée national Gustave Moreau, 14, rue de La Rochefoucauld, 75009 Paris. Tous les jours de 10h à 18h. Tél. : 01 48 74 38 50, site Internet : musee-moreau.fr

À lire : Gustave Moreau. Les Fables de La Fontaine, coédition musée Gustave Moreau / In Fine, 39 €.