![Fouille au sommet du mont Hellanion. © ESAG](https://www.actu-culture.com/wp-content/uploads/2024/06/Egine-1.jpg)
Du sommet de l’Hellanion Oros, la plus haute montagne d’Égine, le regard embrasse un panorama ininterrompu sur la mer Égée, le Péloponnèse et la côte attique. La tradition raconte qu’à cet emplacement se dressait, dans l’Antiquité, un temple à la gloire de Zeus. Une équipe d’archéologues suisses et grecs brave la rudesse des lieux pour comprendre les origines du culte du dieu des dieux.
C’est au XXe siècle, sur les versants du mont, que des recherches allemandes mettent au jour un grand complexe antique lié au culte de Zeus, sans toutefois y localiser le temple et son autel. L’attention des scientifiques se tourne alors vers le sommet de la montagne, dominé aujourd’hui par une petite chapelle orthodoxe. La curiosité des archéologues a en effet été attirée par une figurine en argile d’époque mycénienne (vers 1400-1200 avant notre ère) anciennement découverte à cet endroit et exposée depuis au musée du chef-lieu de l’île.
Des fouilles vertigineuses
C’est pour lever le mystère sur l’emplacement du temple de Zeus Hellanios et les origines de son culte qu’une équipe d’archéologues conduit depuis 2022 des fouilles sur ce pic au centre du golfe Saronique. La fouille est dirigée par Tobias Krapf de l’École suisse d’archéologie en Grèce (ESAG) et Stella Chryssoulaki, ancienne responsable de l’Éphorie des antiquités du Pirée et des îles et désormais directrice générale du musée archéologique d’Héraklion. Pour les scientifiques qui doivent gravir chaque matin le chemin escarpé, le paysage qui s’offre au sommet est vertigineux. La zone de fouille avec ses sondages ouverts à flanc d’escarpement est constamment battue par les bourrasques. Mais le jeu en vaut la chandelle, car la campagne de l’automne passé a permis de mettre au jour en contrebas de la chapelle un bâtiment de l’Âge du bronze et un riche mobilier.
![Bâtiment et céramiques brisées mycéniens. © ESAG](https://www.actu-culture.com/wp-content/uploads/2024/06/Egine-2-scaled.jpg)
Un lieu de repli et de culte
Plus de 30 vases (marmites, récipients à boire et à provisions) de la fin de l’époque mycénienne (vers 1300-1100 avant notre ère) ont ainsi été découverts, certains parfaitement conservés là où ils se trouvaient lors de la destruction du bâtiment. Ils indiquent que, lors de l’effondrement de cette culture palatiale, les habitants de l’île se sont retirés sur la montagne pour se mettre en sécurité. Mais cette trouvaille n’exclut pas l’existence d’un culte antérieur à la construction de cet édifice. La figurine identifiée au sommet de la montagne en est un indice, comme des céramiques datées de la première moitié du IIe millénaire avant notre ère. C’est sur cette piste que la suite des recherches s’est concentrée. Si des traces du culte de Zeus du Ier millénaire avant notre ère et des premiers siècles de notre ère ont été reconnues sur le sommet, une fondation en blocs massifs à côté de la chapelle et des tuiles antiques indiquent qu’une construction plus ancienne, probablement un temple, doit se trouver sous la petite église. Un peu plus bas, des restes de sacrifices ont été identifiés. Depuis l’autel, sûrement implanté au sommet de la montagne, les cendres et les os d’animaux brûlés étaient jetés au bas de la pente. Ces dépôts contenant des milliers de petits fragments d’os sont d’un grand intérêt pour les archéologues qui reconstituent ainsi les gestes rituels. Des lampes à huile indiquent en outre que le culte pouvait se dérouler aussi la nuit. Deux aspects de la montagne ont donc attiré les hommes et les femmes depuis l’Âge du bronze : d’une part la sécurité, liée à sa situation isolée et difficile d’accès et, d’autre part, sa position dominante qui a conduit à sa consécration à Zeus.
![Céramiques mycéniennes. © ESAG](https://www.actu-culture.com/wp-content/uploads/2024/06/Egine-3.jpg)
Tobias Krapf, Stella Chryssoulaki, Leonidas Vokotopoulos, Sofia Michalopoulou et Jérôme André
![](https://www.actu-culture.com/wp-content/uploads/2024/06/l-archeologie-a-la-conquete-du-cheval_pdt_hd_54322.jpg)
Article à retrouver en intégralité dans :
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