De l’Orient à l’Occident, le textile s’anime pour donner vie à d’exubérantes créations de haute couture, de féériques costumes de scène et de chatoyantes tapisseries, à découvrir aux quatre coins de l’Hexagone.
SORÈZE | La nature vue par Dom Robert
Ouvert au public en 2015, le musée Dom Robert renouvelle tous les trois ans la présentation des œuvres textiles afin de préserver au mieux sa collection de tapisseries très sensibles à la lumière. Intitulé « Prairies animées », l’accrochage de 2024 célèbre les mille et une vies qui font vibrer la nature. Il attire l’attention sur les innombrables détails des tapisseries de Dom Robert (1907-1997), peuplées d’oiseaux, d’abeilles, de papillons… et rend hommage au génie créateur du moine bénédictin devenu l’un des maîtres de la tapisserie contemporaine. Deux prêts exceptionnels de la Cité de la Tapisserie d’Aubusson, L’été et La Famille dans la Joyeuse Verdure, rejoignent d’autres œuvres de l’artiste, comme Le Printemps, Le Soleil pour témoin, Farfadet, Les Enfants de lumière, Mille Fleurs sauvages, mais aussi d’Élie Maingonnat, de Gérard Schlosser ou de Léo Chiachio et Daniel Giannone qui ont contribué ou contribuent encore au renouveau de cet art séculaire. Une sélection d’aquarelles, Genêts, Moines jardiniers, Les Moutons et bien d’autres, montrent toute l’ampleur de la créativité de Dom Robert. M.D.
« Prairies animées » au musée Dom Robert et de la tapisserie du XXe siècle, Cité de Sorèze, 1 rue Saint-Martin, 81540 Sorèze. Tél. 05 63 50 86 38. www.domrobert.com
AUBUSSON | Ultime tombée de métier pour Tolkien
Renouer avec la grande tradition de la tapisserie narrative tout en l’adaptant à l’imaginaire contemporain. Tel était l’enjeu de l’enthousiasmante aventure textile imaginée à partir de 2012 par la Cité internationale de la tapisserie – Aubusson et les héritiers de J. R. R. Tolkien (1892-1973) afin de traduire par le fil une sélection de dessins originaux de l’écrivain illustrant Bilbo le Hobbit, Le Seigneur des Anneaux, Le Silmarillion, ou encore les touchantes lettres du père Noël dessinées pour ses enfants. Les quatorze tapisseries et deux tapis de cette tenture sont réunis à Aubusson pour la toute première fois dans une exposition qui retrace le passionnant travail d’interprétation des lissiers, confrontés au choix des dimensions, des couleurs et des textures. L’institution poursuit en parallèle sa série de tissages monumentaux inspirés de l’œuvre de Hayao Miyazaki (né en 1941), maître du cinéma d’animation japonaise. Initié en 2019, ce partenariat avec le Studio Ghibli a déjà connu quatre tombées de métier ; deux ultimes tapisseries seront exécutées d’ici 2027. O.P.-M.
« Aubusson tisse Tolkien. L’aventure tissée », jusqu’au 30 septembre 2024 au Centre culturel et artistique Jean Lurçat, avenue des lissiers, 23200 Aubusson. Tél. 05 55 66 66 66. www.cite-tapisserie.fr
Catalogue, éditions Lienart, 112 p., 27 €.
PERPIGNAN | Jean Lurçat, tapissier et céramiste
Connu surtout pour ses tapisseries, Jean Lurçat (1891-1966) pratiqua également la peinture, le dessin, l’aquarelle, l’estampe, ou encore l’art du vitrail, de la mosaïque, des décors de théâtre… C’est toutefois sa production céramique, réalisée à partir de 1951 dans l’atelier Sant Vicens près de Perpignan, que le musée Hyacinthe Rigaud a choisi de mettre au cœur de sa nouvelle exposition consacrée à l’artiste. En réunissant une centaine de ses plats et vases en terre cuite émaillée, elle montre à quel point Jean Lurçat a su apporter un nouveau souffle à un art longtemps considéré comme une production utilitaire, artisanale ou industrielle. Comme Maillol, Matisse, Dufy, Fayet, Violet, et surtout Picasso et Miró, l’artiste a cherché à explorer toutes les possibilités offertes par l’argile. La création céramique rejoint son goût de la symbolique puisqu’elle repose sur l’alliance de la terre, de l’eau, de l’air et du feu. Les motifs de prédilection de ses tapisseries, comme le soleil, le coq et le poisson, se retrouvent fréquemment sur ses pièces en faïence. Après de premières réalisations marquées par la bichromie (en noir et blanc, ou en jaune et vert), l’artiste met au point à partir de 1957 de nouvelles associations de couleurs, comme le jaune, l’orange, le bleu, le vert, le noir et le blanc, et surtout le « rouge Lurçat » qui devient une de ses marques de fabrique. Sa maîtrise des émaux lui permet des jeux de contrastes inédits entre les teintes mates et brillantes. Ses décors, souvent marqués par des figures féminines de danseuses ou de baigneuses, se font de plus en plus complexes. Présentée aux côtés de tableaux, de dessins et de tapisseries qui retracent toute son évolution stylistique au fil des années, sa production céramique révèle un aspect méconnu de son univers esthétique. M.D.
« Jean Lurçat. La Terre, le Feu, l’Eau, l’Air », jusqu’au 29 décembre 2024 au musée d’art Hyacinthe Rigaud, 21 rue Mailly, 66000 Perpignan. Tél. 04 68 66 19 83. www.musee-rigaud.fr
Catalogue, coédition musée d’art Hyacinthe Rigaud / Silvana Editoriale, 296 p., 39 €.
DRAGUIGNAN | Rêve d’Orient
Évoquant tout un imaginaire de caravanes chargées de marchandises précieuses, les « Routes de la Soie » fascinent depuis l’Antiquité. Réalisée grâce à un partenariat exceptionnel avec le musée national des arts asiatiques Guimet, l’exposition nous entraîne sur les traces des voyageurs, des marchands et des explorateurs qui parcoururent l’Asie Centrale pour relier l’Extrême-Orient au bassin méditerranéen. Le développement de ces routes commerciales remonte au IIe siècle avant notre ère, grâce à une période de stabilité et de paix relative, à la fois dans les mondes romain et chinois. Il permit la mise en place d’échanges de denrées alimentaires (en particulier les épices), de textiles, de pierres précieuses, mais aussi de connaissances, de techniques, ou même d’idées et de récits. De nombreux vestiges archéologiques prouvent l’importance des grandes cités marchandes et des oasis du bassin du Tarim. M.D.
« Les routes de la Soie : entre vestiges et imaginaire », jusqu’au 29 septembre 2024 à l’Hôtel départemental des expositions du Var, 1 boulevard du Maréchal Foch, 83300 Draguignan. Tél. 04 83 95 34 08. www.hdevar.fr
MOULINS | L’univers Découflé
Dans une scénographie spectaculaire de Marco Mencacci, une centaine de costumes fait revivre l’effervescence des quarante années de carrière de Philippe Découflé. Depuis Codex, son premier grand spectacle monté à Avignon en 1986 jusqu’à son célèbre Octopus, l’univers fantastique du chorégraphe éblouit par ses multiples facettes. Entre extravagance et ingéniosité, les costumes créés par Philippe Guillotel, Jean Malo, Laurence Chalou, Charlie Le Mindu comptent parmi les plus impressionnants de la danse contemporaine. Toutes les audaces sont permises, comme de demander aux interprètes de danser avec des palmes ou de faire endosser au « musicien bizarre » une queue-de-pie en lévitation. Le parcours se termine en fanfare dans la dernière salle consacrée à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’Albertville en 1992 : 500 danseurs y arboraient des costumes plus étourdissants les uns que les autres. M.D.
« Planète(s) Découflé », jusqu’au 5 janvier 2025 au Centre national du Costume et de la Scène (CNCS), Quartier Villars – Route de Montilly, 03000 Moulins. Tél. 04 70 20 76 20. www.cncs.fr
Catalogue, coédition CNCS / 5 Continents, 176 p., 35 €.
AZAY-LE-RIDEAU | Costumes féériques
Inspirée par le miroir d’eau dans lequel se reflètent les somptueuses façades du château d’Azay-le-Rideau, Delphine Pinasa, directrice du Centre national du Costume et de la Scène, a choisi d’y présenter les plus merveilleux des costumes de théâtre, de ballet et d’opéra conservés dans ses collections et liés au thème aquatique. Les tenues créées pour Ondine, Isoline, Les Indes galantes, La Flûte enchantée ou bien évidemment Le Lac des Cygnes apportent un nouvel enchantement à la féérie de cette demeure de la Renaissance. M.D.
« Habiller le merveilleux. Costumes de scène », jusqu’au 3 novembre 2024 au château d’Azay-le-Rideau, 19 rue Balzac, 37190 Azay-le-Rideau. Tél. 02 47 45 42 04. www.azay-le-rideau.fr
Catalogue, Éditions du patrimoine, 64 p., 14 €.
CALAIS | Mode et innovation
Toute l’inventivité du créateur de mode Yuima Nakazato (né en 1985) se dévoile à la Cité de la Dentelle et de la Mode. Une cinquantaine de vêtements, accompagnés de nombreux accessoires, croquis de mode, dessins techniques et échantillons de matières, met en avant la complexité de son travail, entre tradition et innovation. Yuima Nakazato s’inspire des savoir-faire séculaires japonais tout en multipliant les recherches sur les procédés de fabrication textile et les matériaux recyclés pour créer une mode plus respectueuse de l’environnement. M.D.
« Yuima Nakazato. Au-delà de la couture », jusqu’au 5 janvier 2025 à la Cité de la Dentelle et de la Mode, 135 quai du Commerce, 62100 Calais. Tél. 03 21 00 42 30. www.cite-dentelle.fr
Catalogue, coédition Cité de la Dentelle et de la Mode / Lienart, 144 p., 30 €.
Mathilde Dillmann et Olivier Paze-Mazzi