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Face à Horace Vernet, Guillaume Bresson bouscule Versailles

Vue de l’exposition « Guillaume Bresson Versailles ». Les toiles d’Horace Vernet sont visibles derrière celles de Guillaume Bresson.

Vue de l’exposition « Guillaume Bresson Versailles ». Les toiles d’Horace Vernet sont visibles derrière celles de Guillaume Bresson. Photo service de presse. © château de Versailles, T. Garnier

Le château de Versailles accueille la première rétrospective de l’artiste contemporain Guillaume Bresson. En confrontant ses tableaux avec les immenses scènes de batailles réalisées par Horace Vernet au XIXe siècle, il consacre le renouveau du genre de la peinture d’histoire.

Une scène de violence dans un parking souterrain exposée sous les ors du château de Versailles ? Les œuvres de Guillaume Bresson (né en 1982) qui transcrivent la brutalité du monde contemporain détonnent au milieu du décor opulent des salles d’Afrique célébrant la ­monarchie de Juillet. Dans ces pièces gigantesques qui devaient constituer l’aboutissement des Galeries historiques créées par Louis-Philippe, les tableaux aux dimensions colossales peints par Horace Vernet magnifient la conquête de l’Algérie, comme La Prise de la Smala d’Abd-el-Kader par le duc d’Aumale mesurant près de 5 mètres de haut sur 21 de long.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2023. Huile sur bois, 187 x 126 x 8 cm, encadré. Belgique, Collection Diskus.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2023. Huile sur bois, 187 x 126 x 8 cm, encadré. Belgique, Collection Diskus. Photo service de presse. © Adagp, Paris 2024, crédit photo: Bertrand Huet / Tutti image Courtesy of the artist and Galerie Nathalie Obadia Paris/Brussels

Une confrontation inédite

En raison de leurs sujets « que l’on ne voit pas aujourd’hui du meilleur œil », pour reprendre l’euphémisme employé par Christophe Leribault, ces compositions spectaculaires sont habituellement dissimulées par les cimaises des expositions temporaires. Le nouveau président du château de Versailles a choisi d’inverser la perspective en organisant une confrontation entre ces œuvres et les créations de Guillaume Bresson qui expriment « deux formes d’art et de violence, saisies à près de deux siècles d’écart, télescopant les conquêtes coloniales du XIXe siècle et la brutalité des banlieues contemporaines, non sans pointer leurs liens ».

Guillaume Bresson, Sans titre, 2013-2017. Huile sur toile, 170 x 300 cm. Toulouse, Collection les Abattoirs, Musée-Frac Occitanie.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2013-2017. Huile sur toile, 170 x 300 cm. Toulouse, Collection les Abattoirs, Musée-Frac Occitanie. Photo service de presse. © Adagp, Paris 2024, crédit photo: Bertrand Huet / Tutti image Courtesy of the artist and Galerie Nathalie Obadia Paris/Brussels

Des corps tourmentés dans un espace sans fin

L’influence de la peinture baroque dans l’œuvre de Guillaume Bresson a également contribué à ce rapprochement. Elle se lit dans les jeux de clair-obscur, et surtout dans la théâtralité des poses des personnages, élaborées grâce à un travail préparatoire quasiment chorégraphique mené par l’artiste et ses modèles. Ses dernières compositions, qui mettent en scène des corps tourmentés tombant dans un espace sans fin, reprennent les grands modèles du Jugement dernier, tout en faisant référence aux angoisses actuelles provoquées par les catastrophes climatiques. La minutie de sa technique de peinture à l’huile confère à ses tableaux la précision de la photographie tout en leur donnant une profondeur supplémentaire.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2024. Huile sur bois, 96,2 x 96,2 x 5,1 cm. Collection particulière.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2024. Huile sur bois, 96,2 x 96,2 x 5,1 cm. Collection particulière. Photo service de presse. © Adagp, Paris, 2025, crédit photo : Simon Cherry © Courtesy of the artist and Galerie Nathalie Obadia Paris / Brussels

Réappropriation et détournement des codes

Guillaume ­Bresson se réapproprie les codes du grand genre académique de la peinture d’histoire tout en les détournant pour interroger les problématiques sociales actuelles. Son travail est emblématique du retour en force de la peinture figurative dans l’art contemporain. Longtemps délaissée, voire méprisée, au point que le peintre a dû réinventer certaines techniques comme le raccourci qui n’était plus enseignées aux Beaux-Arts de Paris, elle retrouve aujourd’hui sa pertinence. Et cette exposition versaillaise lui offre ses lettres de noblesse.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2008. Huile sur toile, 170 x 300 cm. Bâle, collection particulière.

Guillaume Bresson, Sans titre, 2008. Huile sur toile, 170 x 300 cm. Bâle, collection particulière. Photo service de presse. © Adagp, Paris 2024, crédit photo : Martin Müller, Courtesy of the artist and Galerie Nathalie Obadia Paris/Brussels

« Guillaume Bresson Versailles », jusqu’au 25 mai 2025 dans les salles d’Afrique du château de ­Versailles, 78000 Versailles. Tél. 01 30 83 78 00. www.chateauversailles.fr

Album de l’exposition, coédition château de Versailles / In Fine, 48 p., 12 €.