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Occupations rurales gauloises dans les Landes

Vue aérienne de la fouille.

Vue aérienne de la fouille. © Éveha 2024

Tout près de l’Océan, non loin de Capbreton, la société Éveha a mené, à Bénesse-Maremne, une vaste opération préventive en amont d’un projet de lotissement. Des exploitations rurales, avec habitations et annexes agraires, remontant à la Protohistoire et à la période gallo-romaine y ont été dévoilées. Alors que l’historiographie traditionnelle fait des Landes un territoire vierge de toute occupation jusqu’à récemment, cette découverte exceptionnelle rebat les cartes.

Mentionnée dans les sources historiques dès 1355, Bénesse-Maremne est située sur l’axe Bayonne-Dax et sur la voie royale, ancien tracé romain longeant la côte de Bordeaux à Bayonne.

Des vestiges fort bien conservés

Mais elle se développe surtout au XIXe siècle dans un contexte de tourisme thermal. C’est à quelques centaines de mètres au nord du bourg, au chemin du Pont à Loriot, sur 3,6 ha, que Nicolas Peyne et son équipe d’Éveha ont conduit leurs recherches en 2024. Ces dernières ont permis de retrouver des traces de l’ancien bourg et ses chemins d’accès. Par chance, grâce à l’apport éolien de l’Océan ayant progressivement recouvert les vestiges, ceux-ci sont bien conservés. Et la stratégie minutieuse de décapage, bien que complexe à réaliser, a été essentielle pour mettre en lumière ces découvertes. « Nous avions de vastes niveaux de sol avec des couleurs et des strates différentes qui indiquaient clairement à quelle période appartenaient chaque fossé et les bâtiments », précise Nicolas Peyne.

Quarante-deux bâtiments

La plus grande partie de l’occupation du site s’étend du IIIe siècle avant notre ère à la fin du Ier siècle de notre ère. Quatre siècles durant lesquels de petites exploitations rurales et des habitats s’installent les uns à côté des autres et se déplacent légèrement au fil des reconstructions. « Malgré la présence de quarante-deux bâtiments, ce n’était pas un village gaulois », souligne le spécialiste. En l’absence de mobiliers significatifs et d’ossements d’animaux (sans doute disparus à cause de l’acidité du sol), 250 prélèvements ont été effectués pour en savoir plus sur les installations ou le contenu des fossés et des quatre silos. Cette cartographie chimique du sol permettra de mieux cerner les éléments caractéristiques, tels le phosphore des déjections animales correspondant aux zones de parcage ou le potassium, témoignant de la présence de végétaux (battage ou stockage de céréales par exemple).

Un fragment d’amphore gréco-italique

Quatre habitations gauloises et trente-huit annexes agraires édifiées sur poteaux ont été décelées. Réparties de manière homogène, elles se différencient par leur forme, leur mode de construction et leurs dimensions. Trois caisses de céramiques médiévales et modernes puis cinq autres du IIIe siècle avant notre ère au Ier de notre ère ont été prélevées, dont l’étude est en cours. Autre découverte remarquable, un fragment d’amphore gréco-italique du début du IIe siècle avant notre ère indique l’approvisionnement en vin d’Italie. Aucune pratique artisanale n’a été décelée. Enfin, les études archéobotaniques (anthracologie, carpologie et palynologie) aideront à préciser le couvert végétal et son évolution au cours des siècles, ainsi que les modes de gestion forestière, pastorale et d’élevage dans l’économie antique.
Ces découvertes offrent désormais une nouvelle vision du territoire et permettent de changer le paradigme des Landes vues, au mieux, comme un territoire d’habitat temporaire rythmé par la transhumance, au pire, comme vide d’occupation au second Âge du fer.