La grotte de Rouffignac (2/2). Un habitat mésolitique original

Remontage illustrant l’exploitation de la matière première disponible dans la grotte.

Remontage illustrant l’exploitation de la matière première disponible dans la grotte. © Frédéric Plassard, grotte de Rouffignac

Le site est temporairement délaissé après le passage des artistes magdaléniens, mais il y a 10 000 ans, les Mésolithiques s’approprient les lieux. Pendant trois millénaires, ils vont régulièrement s’installer sous le porche d’entrée et parfois s’aventurer dans les galeries profondes.

Depuis le temps des mammouths, le climat s’est radouci et les paysages se sont boisés impliquant des adaptations dans le mode de vie des populations. L’usage de l’arc s’est généralisé et, dans un tableau de chasse qui se diversifie, le sanglier, le cerf et le chevreuil dominent désormais. Les fouilles de Claude Barrière entre 1957 et 1962 livrent de très nombreux vestiges du quotidien de ces gens : outillages en silex, en os et en bois de cerf, ossements des animaux chassés, coquilles de noisettes et d’escargots… De récentes études de ces documents montrent que certaines lames de silex utilisées comme des couteaux ont servi au travail du roseau… peut-être pour réaliser des hampes de flèche ?

L’exploitation du silex

Outre la présence exceptionnelle d’objets décorés (deux outils en os gravés de motifs géométriques), une des originalités de l’occupation mésolithique de Rouffignac réside dans l’exploitation de nodules de silex omniprésents en saillie sur les parois et jonchant le sol des galeries. L’étude d’un échantillon de vestiges abandonnés sur moins de 3 mà environ 800 m de l’entrée a permis de mieux comprendre la stratégie d’exploitation d’une matière première à la fois abondante et de qualité variable. Les 1 200 pièces étudiées montrent tout d’abord que la seule activité pratiquée sur place fut le test et le dégrossissage des blocs, sans doute à la lueur d’une torche. Le tailleur a exploité une série de nodules récoltés à proximité et s’est adapté à la qualité de la matière première. Trois situations peuvent être identifiées :
1. Le silex est de très bonne qualité. Dans ce cas, après l’enlèvement d’un ou deux éclats, abandonnés sur place, le nodule est emporté ailleurs (dehors ?) pour être débité en lames, éclats ou lamelles. Ces dernières étaient indispensables à la production de tout petits outils, les microlithes, qui servaient d’armatures de flèches.
2. Le silex n’est pas exploitable en totalité. On a éliminé (et abandonné sur place !) toutes les parties inutilisables pour n’emporter que le volume de roche apte à la taille.
3. Le rognon de silex est inexploitable : après quelques tentatives, le bloc est abandonné sur place. L’intérêt réside dans le caractère exceptionnel de l’exploitation du silex en galerie naturelle et, dans ce cas, dans le lien évident, confirmé par des datations au radiocarbone, entre ce poste de taille spécialisé et l’habitat à l’entrée de la grotte.