La galerie Schumm-Braunstein expose les dessins de François Righi

Marie Grégoire, François Righi (né en 1946), Les Heures dispersées, Les livres sont muets, 2014, in-8 (26 x 24,5 cm), 32 p., 19 dessins et calligraphies de François Righi imprimés en lithographie, 3 eaux-fortes, reliure à la chinoise. © Anne-Solange Gaulier
La galerie Schumm-Braunstein présente des dessins de François Righi montrés au public pour la première fois. Une série de grande ampleur, de forme et de format inhabituels pour l’artiste connu par ses livres méticuleux ; une série pour autant intimement liée au fil de son œuvre.
Un protocle très strict
Dans le nœud, infini et mille fois répété de ses dessins, il y a un protocole très strict. Un tracé initial, lancé sur la feuille blanche à la mine de plomb, est ensuite répété cent fois, la précision exigeant que soient reliés entre eux chacun des points d’intersection de la ligne. Le même tracé nodal, le même entrelacs systématique se fait ainsi jour à mesure que se noircit le blanc. Puis c’est au tour du pastel sec de venir recouvrir la centaine de tracés ; le pastel glisse sur les traits à mesure qu’il les caviarde, et donne au dessin un lointain aspect de gravure. Au premier abord, cet écran noir nous bouche la vue. À son approche pourtant, ce que l’on pensait masqué nous est révélé. La pulvérulence de la matière conserve la mémoire des précédents gestes et nous invite à les suivre, les relier, les déplier.
François Righi (né en 1946), Trombes VIII. © François Lauginie-GSB
Un geste rapide et violent
Dans le nœud des gestes du dessinateur, il y a le souvenir des gestes du danseur qu’il fut jadis. L’artiste a fait l’expérience de tracer ces lignes à l’échelle de son corps, de s’impliquer physiquement avec sa feuille et d’embarquer le regardeur-spectateur dans ce geste rapide et violent, dans cette mécanique répétitive et épuisante, dans ce vertige. Face à la feuille à taille humaine, il faut accueillir l’énergie de ce que l’artiste considère comme son plus grand livre et prendre la mesure de notre engagement : ne pas voir pour mieux voir, se laisser infuser de lumière obscure, pénétrer un univers fait d’histoires intimes et de partages sensibles.
Une constellation de sens et de liens
Dans le nœud des gestes de François Righi, il y a un fil, aussi ténu que tenace, qui relie ses œuvres entre elles, de la feuille à la page, de l’œuvre au livre. La clé de cette énigme réside dans le « diagramme paonalogique » qui charpente l’œuvre de l’artiste depuis des années : un système de pensée construit en association d’idées, en correspondances, une constellation de sens et de liens. Le titre de l’exposition reprend justement l’une des 208 entrées textuelles de ce diagramme. Si l’on en tire le fil, on remonte la piste du tracé nodal jusqu’en 2004, date de la première occurrence de cette technique utilisée dans un livre. L’exposition propose donc une présentation inédite de quelques grands dessins, mis en lien avec des livres et des sérigraphies, bouclant ainsi la boucle, nouant sans fin la lecture d’une œuvre qui n’a de cesse de se faire elle-même écho. À cette occasion, l’artiste renoue un dialogue de longue date avec l’écrivain Nicolas Pesquès. Ensemble, ils cosignent un nouveau livre intitulé Trombes.
« François Righi. Cérémonie nocturne », jusqu’au 18 avril 2025, galerie Schumm-Braunstein, 9, rue de Montmorency 75003 Paris. Du mardi au samedi de 14h30 à 19h et sur rendez-vous. Tél. : 01 40 29 03 72. www.galerie-schummbraunstein.com
Parution à l’occasion de l’exposition : Nicolas Pesquès, François Righi, Trombes, 2025, coédition Les livres sont muets / galerie Schumm-Braunstein, 32 p., 15 x 14,5 cm, 11 reproductions photographiques, jaquette poster pliée 3 fois, le tout sur papier Munken Rough, 300 ex. Édition courante (15 €), tirage de tête à 50 ex. augmenté d’une intervention de l’artiste.