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Techniques de reliure de Florent Rousseau : le titre dans la reliure de création

Georges Rouault, Divertissement. Reliure de Florent Rousseau (détail), 2005.

Georges Rouault, Divertissement. Reliure de Florent Rousseau (détail), 2005. Florent Rousseau

L’histoire de la reliure montre que la place du titre a évolué au fil du temps : de facture classique, uniquement sur le dos, il a migré sur les plats et, à certaines périodes, il a complètement disparu. Il est vrai que les nouvelles structures de reliure (croisée, apparente ou japonaise) ne laissaient que peu de place au titre. L’information auteur-titre était cantonnée à la boîte ou à la chemise étui.

Le titre peut également faire partie intégrante du décor. Certains relieurs comme Alain Devauchelle l’ont magnifié au point d’en faire la base de leur composition. Pour moi, le titre n’a jamais été une contrainte, il trouve sa place en fonction de mes projets décoratifs tantôt sur le dos, tantôt sur les plats, et il est même parfois l’objet décoratif lui-même. Le titre ne doit pas parasiter mes recherches décoratives ; sa place devient une évidence.
J’ai eu la chance de travailler avec des doreurs qui ont su s’adapter à mes exigences et, comme j’interviens souvent sur le cuir de façon expérimentale, de nombreux essais s’imposent. C’est pourquoi j’invite les relieurs à aller chez le doreur avec un échantillon du cuir, travaillé ou non, pour réaliser des tests. Personnellement, il m’est arrivé de renoncer à placer un titre lorsque la matière du décor réagissait mal à l’apport de la chaleur. Seuls des essais permettent d’évaluer le rendu des caractères et de la couleur choisis. Voici quelques exemples d’emplacement du titre.

Le titre est le décor

Françoise Sagan, Toxique, illustrations Bernard Buffet. Reliure de Florent Rousseau, 2008.

Françoise Sagan, Toxique, illustrations Bernard Buffet. Reliure de Florent Rousseau, 2008. © Florent Rousseau

Titre-décor réalisé au pastel gras sur le plat recto : le titre devient décor à part entière.

Emplacement classique

Straparole, Les Facétieuses Nuits. Reliure de Florent Rousseau, 1994.

Straparole, Les Facétieuses Nuits. Reliure de Florent Rousseau, 1994. © Florent Rousseau

Auteur et titre sur le dos.

Titre à la chinoise

Robert Desnos, Mines de rien, illustration André Masson. Reliure de Florent Rousseau, 1997.

Robert Desnos, Mines de rien, illustration André Masson. Reliure de Florent Rousseau, 1997. © Florent Rousseau

Le titre, à la chinoise, est rehaussé de filets de couleurs complétant le décor.

Le titre : mise en valeur du décor

Michel Butor, Requiem, illustrations Michel Roncerel. Reliure de Florent Rousseau., 2011.

Michel Butor, Requiem, illustrations Michel Roncerel. Reliure de Florent Rousseau., 2011. © Florent Rousseau

Ici, le titre est sur le plat recto, encadrant une partie du décor (monotype sur cuir).

Le titre : prolongement du décor

James Joyce, Ulysse. Reliure de Florent Rousseau, 2006.

James Joyce, Ulysse. Reliure de Florent Rousseau, 2006. © Florent Rousseau

Le titre est composé de trois couleurs assorties à la composition papier. Le mot, répété trois fois, est agencé en miroir.

Titre sur étiquette

Michel Butor, Répertoire. Reliure de Florent Rousseau, 2020.

Michel Butor, Répertoire. Reliure de Florent Rousseau, 2020. © Florent Rousseau

Le titre et le nom de l’auteur sont appliqués sur des étiquettes du même cuir que la couvrure. Elles sont incrustées dans chaque plat et mises en valeur par des cabochons colorés rectangulaires.

Titre incorporé au décor sur les deux plats

Patrick Modiano, Encre sympathique. Reliure de Florent Rousseau, 2020.

Patrick Modiano, Encre sympathique. Reliure de Florent Rousseau, 2020. © Florent Rousseau

Le titre est sur le premier plat, le nom de l’auteur, sur le plat arrière. Le film est teint de façon à assortir les lettres au décor.

Titre avant couvrure

André Breton, Manifeste du surréalisme. Reliure de Florent Rousseau, 2007.

André Breton, Manifeste du surréalisme. Reliure de Florent Rousseau, 2007. © Florent Rousseau

Le titre est pensé avant couvrure et incorporé avant collage des plats. Ici, une reliure à plats rapportés. Les lettres sont assorties à certains éléments décoratifs.

Titre sans doreur

Michel Butor, Où. Reliure de Florent Rousseau, 2020.

Michel Butor, Où. Reliure de Florent Rousseau, 2020. © Florent Rousseau

Là, le titre n’est pas réalisé par le doreur, il fait partie intégrante du décor. Ce sont des lettres en carton qui sont gainées de cuir assorti au cuir de couvrure. L’accent du « Où » est en papier effet miroir. Le titre est exécuté sur une étiquette qui est ensuite glissée dans une sorte de pochette métallique vissée au plat.

Titre réalisé avant l’application du décor

Moïse Maïmonide, La matière est un voile, illustrations Albert Woda. Reliure de Florent Rousseau, 2018.

Moïse Maïmonide, La matière est un voile, illustrations Albert Woda. Reliure de Florent Rousseau, 2018. © Florent Rousseau

Ce titre a été fait sur la peau de couvrure avec des Letraset, puis le décor – un voile de papier de soie – est venu le recouvrir.

Le titre, synthèse du décor

Jean Genet, Les Bonnes. Reliure de Florent Rousseau, 2015.

Jean Genet, Les Bonnes. Reliure de Florent Rousseau, 2015. © Florent Rousseau

Le titre peut s’imposer plus que le décor lui-même. Voici un exemple de composition sur étiquette, reprenant les couleurs du cuir.

Je tiens à remercier tous les doreurs avec qui j’ai collaboré : l’Atelier La Feuille d’Or (Pascale Thérond et Michel Vatonne), Carole Laporte, Stéphane Gangloff et Patrick Prouteau.

Florent Rousseau, professeur de décor du livre à l’AAAV. Courriel : florent.rousseau3@wanadoo.fr ; site Internet : atelierflorentrousseau.com