Au Palais Galliera, chapeau bas à Stephen Jones
Pour la première fois depuis quarante ans, le Palais Galliera consacre une exposition à un accessoire de mode incontournable : le chapeau, à travers l’œuvre de Stephen Jones (né en 1957), célèbre modiste britannique.
Diplômé de la Saint Martin’s School of Art, Stephen Jones découvre l’univers du chapeau en 1977 alors qu’il est en stage au sein de la maison Lachasse. Il décide alors de devenir modiste, un choix audacieux à l’époque où la chapellerie est considérée comme désuète. Après une première tentative avortée de s’installer à Paris, Jones ouvre sa première boutique à Londres en 1980. Très vite, il dépoussière l’univers des couvre-chefs, qu’il aborde comme une œuvre d’art.
« Le design d’un chapeau tient à de nombreux éléments : forme, couleur, texture, influences culturelles, et même la mode ! Mais ce qui compte, c’est l’envie qu’il suscite en vous. »
Stephen Jones
Il crée ses premiers chapeaux pour les personnalités qui fréquentent le Blitz, club incontournable associé au mouvement londonien des « Nouveaux romantiques », un courant musical issu du punk, dont il fait lui-même partie. Il attire ainsi l’attention de plusieurs personnalités du monde de la mode, dont Jean-Paul Gaultier, avec lequel il travaille pour la première fois en 1983. Cette collaboration marque le début d’une carrière internationale prolifique, au cœur de laquelle Paris occupe une place toute particulière. L’exposition retrace ces quatre décennies de création à travers plus de 170 chapeaux, un régal pour les yeux !
Un couvre-chef pour chaque occasion
Au cours de sa prolifique carrière, Stephen Jones s’est intéressé à de nombreuses formes de couvre-chefs : il crée ainsi de multiples variations autour du haut-de-forme, chapeau britannique par excellence, du béret, symbole de la France, ou encore du fez pour la collection printemps-été de Jean-Paul Gaultier en 1984. Mais il réalise également des chapeaux melon, des bibis, des toques, des capelines, et des structures virtuoses et souvent farfelues qui n’appartiennent qu’à lui et qu’on serait bien en peine de définir.
Plus près des étoiles
Si ses origines britanniques et son amour de la France sont récurrents dans ses créations, Stephen Jones n’hésite pas à y instiller également d’autres passions. Ainsi, dès ses jeunes années, l’artiste est fasciné par les étoiles et l’astronomie. Il lit des bandes dessinées et des comics de science-fiction et regarde la série Les Sentinelles de l’air. Il transcrit cette passion dans ses créations, à l’image du chapeau Planet, qui évoque clairement Saturne et ses anneaux.
Ode au surréalisme
À force de visiter les musées, Stephen Jones est pétri de références artistiques, qu’on retrouve dans ses collections. Il est particulièrement sensible à l’univers plein d’humour des surréalistes et comme eux, il détourne volontiers des objets du quotidien, afin de créer des chapeaux pour le moins inattendus et loufoques. Le modiste donne ici naissance à un chapeau déstructuré, dont tous les éléments forment une sorte d’éclaté, comme si une balle avait été tirée depuis l’intérieur, ce que suggère également son nom, Bang !.
Inspirations multiples
Qu’il s’agisse de formes ou de matières, Stephen Jones se renouvelle sans cesse et ses sources d’inspiration sont innombrables. Ici, il associe la barrière de corail de Lord Howe Island, située au large de l’Australie, et une chanson de Brian Eno, intitulée Little Fishes. En agençant quelques couches de tulle superposées, le modiste parvient à suggérer les douces ondulations de la Grande Barrière de corail et l’atmosphère quelque peu planante créée par Eno.
Comme un hommage
Stephen Jones aime rendre hommage aux couturiers, aux modistes, aux artistes qu’il admire. Avec ce chapeau constitué d’une bande gros-grain de soie enroulée sur elle-même, il évoque une œuvre de Marion Adnams (1898-1995), dont il reprend le titre et la date. Cette peinture surréaliste britannique représente un paysage nuageux sur lequel se détache une poupée de papier, qui arbore les mêmes enroulements que le couvre-chef de Jones.
« Stephen Jones. Chapeaux d’artiste », jusqu’au 16 mars 2025 au palais Galliera, musée de la mode de Paris, 10 avenue Pierre Ier de Serbie, 75116 Paris. Tél. 01 56 52 86 00. www.palaisgalliera.paris.fr
Catalogue, Paris Musées, 176 p., 40 €.