Ces œuvres qui vont faire monter les enchères en avril

Nicolas de Staël (1914-1955), Étude pour Le Parc des Princes. Signé, titré et daté 1952 (au dos). Huile sur toile, 18,7 x 24 cm. Estimé : 300 000/500 000 €. Photo service de presse. © Adagp, Paris, 2025
Tandis que Christie’s met à l’honneur les collections Canonne et Funck-Brentano, et qu’Ader propose à la vente une exceptionnelle commode royale, Artcurial se concentre sur l’art ancien flamand, et Sotheby’s rend hommage à la créatrice du premier musée brésilien dédié à l’art d’après-guerre.
La collection Funck-Brentano plaidoyer pour la modernité
La dispersion de la collection Funck-Brentano inaugurera une série de ventes chez Christie’s dédiées à l’art des XXe et XXIe siècles. Cet ensemble d’une valeur globale de 4,5 à 7 M€ a été réuni par Liselotte Kahn et Roland Funck-Brentano, deux ténors du barreau passionnés par l’art moderne. Leur cabinet d’avocats d’affaires fondé en 1954 se consacra d’ailleurs en partie à la défense des intérêts juridiques de nombreux artistes. La collection comprend des œuvres emblématiques de Hans Hartung, Pierre Paulin, Alexander Calder, Frantisek Kupka, Pierre Soulages, ainsi qu’une importante sculpture de Sophie Taeuber-Arp. Les œuvres de cette dernière sont rares sur le marché de l’art et la présence de ce relief en bois polychrome est en soi un événement. Longtemps éclipsée par la notoriété de son époux, cette artiste avant-gardiste à l’œuvre pluridisciplinaire a acquis récemment une véritable notoriété internationale, notamment grâce à la grande rétrospective Living Abstraction organisée conjointement par le Kunstmuseum de Bâle, la Tate de Londres et le MoMa de New York. Le Relief rond en quatre hauteurs exécuté en 1936 (1,9/2,5 M€), a été acquis directement dans la succession de l’artiste par le peintre Michel Seuphor qui en fit don au couple Funck-Brentano. La vente comprend aussi un groupe de sept œuvres inédites de Victor Vasarely avec qui les collectionneurs avaient tissé des liens très étroits. Notons en particulier deux huiles sur toiles parmi lesquelles figure Kepler-II (1974), emblématique de la période Vega, la plus cotée chez ce grand représentant de l’art cinétique (150 000/200 000 €).
Sophie Taeuber-Arp (1889-1943), Relief rond en quatre hauteurs, 1936, pièce unique. Éléments courbes, coupant(s), cassant(s) avec le cachet de l’atelier (au revers). Relief en bois peint, D. 60 cm. Estimé : 1,9/2,5 M€. Photo service de presse. © Christie’s Images Limited 2025
Vente Paris, Christie’s, le 8 avril 2025 à 15h. www.christies.com
La leçon impressionniste de la collection Cannone
La collection Canonne est un hommage vibrant à l’impressionnisme, réunissant de nombreuses œuvres emblématiques du mouvement conservées à l’abri des regards depuis plus de 80 ans. Cet ensemble a été constitué par Henri-Edmond Canonne (1867-1961), pharmacien et industriel parisien qui doit sa renommée à la célèbre pastille Valda commercialisée en 1902. Émerveillé par cette collection, le critique d’art Arsène Alexandre lui a même consacré tout un ouvrage en 1930, célébrant le « goût Canonne » et soulignant l’alchimie rare entre l’homme et les œuvres choisies. Parmi les joyaux de la vente figurent trois tableaux de Renoir, La Leçon d’écriture (2/3 M€) vers 1905 qui fait écho à la toile conservée à la Fondation Barnes, Jeune fille appuyée sur sa main (1894, 2,5/3,5 M€) et Nu sur un fauteuil (500 000/700 000 €). Un rare Bonnard de 1915, Nu se coiffant devant la glace (350 000/550 000 €), se joint à ce groupe de tableaux célébrant la grâce féminine. La vacation comprend également une sélection de paysages où brille une toile de Pissarro, Le Quartier de l’Hermitage, Pontoise de 1874 (1/2 M€), à côté d’œuvres d’Utrillo, Vlaminck, Dufy, Marquet et Signac.
Pierre-Auguste Renoir (1841-1919), La Leçon d’écriture, vers 1905. Signé « Renoir » (en haut à droite). Huile sur toile, 46,4 x 55,2 cm. Estimé : 2/3 M€. Photo service de presse. © Christie’s Images Limited 2025
Vente Paris, Christie’s, le 9 avril 2025 à 15h. www.christies.com
Une commode de provenance royale chez Ader
Une vente classique chez Ader, incluant tableaux, mobilier et objets d’art, mettra à l’honneur une commode de provenance royale (40 000/60 000 €) conservée depuis le XIXe siècle dans une grande collection particulière française. Ce meuble en bois de rose et marqueterie géométrique avec un dessus de marbre blanc, estampillé Daniel Deloose, reçu maître en 1767, est significative du savoir-faire qui fit la supériorité française au Siècle des Lumières. Elle fut livrée pour le comte de Provence en 1771 au château de Marly puis installée dans la chambre de ce dernier où elle demeura jusqu’à la Révolution. Cette livraison alors effectuée par Gilles Joubert au Garde-Meuble de la Couronne comprenait deux commodes identiques. La seconde pièce qui fait pendant à la commode présentée chez Ader a appartenu aux collections Rothschild où elle figurait jusqu’en 2001 avant de rejoindre les collections du musée du Domaine royal de Marly.
Commode en bois de rose et marqueterie géométrique, la façade à double ressaut ouvrant à cinq tiroirs sur trois rangs, à décor de quartefeuilles dans des carrés sur un fond de losanges dans des encadrements de laiton doré à rosaces dans les décrochements, le dessus de marbre blanc reposant sur des montants arrondis prolongés par des pieds cambrés, ornementation de bronzes dorés à frise d’entrelacs, chutes tablier et sabots ; numéro du Garde-Meuble de la Couronne inscrit à l’encre : du N°2613 /2 (biffé) et numéro d’inventaire du château de Marly : M. N°97, sous le marbre : du N° 2613/2 (à l’encre) et lettre B incisée. Estampille de Daniel Deloose, ébéniste reçu maître en 1767 et JME. Époque Louis XV, 1771. 90,5 x 128,5 x 56,5 cm. Estimé : 40 000/60 000 €. Photo service de presse. © Ader
Vente Paris Drouot, Ader, le 30 avril 2025 à 14h. www.ader-paris.fr
Tableaux anciens entre Ciel et Terre chez Artcurial
La prochaine vente de tableaux anciens d’Artcurial intitulée « Entre Ciel & Terre » regroupera un ensemble remarquable de quarante œuvres, consacré essentiellement à l’art flamand. Constituée par un couple de collectionneurs français autour des années 2000, cette collection traduit un intérêt passionné pour la nature tout autant qu’une grande curiosité pour les questions religieuses, avec un choix d’œuvres réalisées au tournant des XVe et XVIe siècles. La sélection met à l’honneur la dynastie des Brueghel avec des œuvres de Pieter Brueghel le Jeune, notamment La Moisson, Allégorie de l’Été (1/1,5 M€) ou La Prédication de saint Jean-Baptiste (800 000/1 200 000 €), ainsi que deux cuivres de Jan Brueghel l’Ancien illustrant l’histoire d’Énée. On remarque également une superbe Vierge à l’Enfant par le Maître de la Légende de sainte Lucie (1/2 M€) qui côtoie un délicat portrait de Corneille de Lyon (120 000/150 000 €) ou une exceptionnelle gouache de Hans Bol (300 000/400 000 €).
Jan Brueghel l’Ancien, Enée et la Sibylle aux Enfers. Huile sur cuivre, 26,5 x 35,5 cm. Estimé : 250 000/350 000 €. Photo service de presse. © Artcurial
Vente Paris, Artcurial, le 30 avril 2025 à 14h30. www.artcurial.com
Voyage à travers les arts décoratifs chez Millon
La vente dédiée aux arts décoratifs du XXe organisée par la maison Millon proposera un florilège d’œuvres témoignant de l’audace créative qui a traversé le XXe siècle pour apporter de nouvelles réponses esthétiques à la vie moderne, transformant ainsi radicalement notre cadre de vie. Cette évolution est illustrée à travers les plus grands noms des arts décoratifs, de Gallé à Lalanne en passant par Prouvé ou Dupré-Lafon. La vente s’ouvre avec des pièces du début du siècle, telles une paire de fauteuils en acajou sculpté de Louis Süe & André Mare, représentative de l’excellence artisanale, ou la sculpture Baby Doll de Demeter Chiparus alliant finement l’ivoire, le bronze et le marbre (30 000/50 000 €). Progressivement, la forme se simplifie tandis que de nouveaux matériaux comme l’acier et l’aluminium s’imposent pour aller vers plus de fonctionnalité. Seront ainsi présentés dans la vacation un bureau aux lignes pures de Paul Dupré-Lafon réalisé vers 1935-1940 (100 000/150 000 €) ainsi qu’une armoire AG11 créée en 1947 par Jean Prouvé, figure emblématique de l’aventure moderniste (12 000/15 000 €).
Paul Dupré-Lafon (1900-1971), bureau moderniste en placage de palissandre et noyer, vers 1935-1940. Pièce unique. 70 x 143 x 59 cm. Estimé : 100 000/150 000 €. Photo service de presse. © Drouot / Millon
Vente Paris Drouot, Millon, le 30 avril 2025 à 14h. www.millon.com
L’héritage de la fondatrice du musée d’art moderne de Rio
Sotheby’s rendra hommage à une figure exceptionnelle du XXe siècle, Niomar Moniz Sodré Bittencourt, une femme visionnaire à qui l’on doit la création du premier musée brésilien dédié à l’art d’après-guerre. Née dans une famille aisée et influente au Brésil, elle grandit dans un milieu où l’art et la culture occupent une place essentielle. Devenue très tôt une journaliste engagée, ses convictions la poussent dès les années 1960 à défendre la liberté, dans un climat politique tendu, alors que le Brésil est tombé sous un régime dictatorial. Passionnée par l’art et la modernité, Niomar a pour ambition de créer le premier musée du Brésil dévolu à l’art moderne. Avec son époux Paulo Bittencourt, elle va œuvrer pour en faire de Rio la capitale, s’immergeant dans les cercles artistiques internationaux. Elle trouve une source d’inspiration déterminante en la personne de Peggy Guggenheim, qui lui fait rencontrer à New York, dès les années 1940, le cœur de l’avant-garde artistique. Tout en se consacrant pleinement à la création du MAM qui sera inauguré en 1958, Niomar entreprend en parallèle sa collection personnelle. Son œil affûté et son savoir lui permettent de constituer un ensemble représentatif de l’art de son temps. Les œuvres de ses artistes de prédilection – Soulages, Arp, Giacometti, Picasso, de Staël, Brancusi ou Morandi, mais aussi les Brésiliens Tarsila do Amaral ou Candido Portinari – sont réunies dans son appartement du quartier de Flamengo à Rio mais un incendie en ravage une très grande partie en 1985. Niomar possède aussi une résidence à Paris, une ville avec laquelle elle entretient des liens forts dans les années 1950. Ce sont soixante-neuf œuvres conservées dans cet appartement, resté intouché depuis les années 1970, qui seront dispersées chez Sotheby’s. Le petit-fils de Niomar, qui se sent investi de la responsabilité de transmettre l’héritage culturel, moral et politique de sa grand-mère, a choisi d’organiser cette vente au printemps 2025, alors que le Brésil sera largement célébré sur la scène artistique internationale (saison culturelle croisée France-Brésil, exposition sur la naissance du modernisme à la Royal Academy of Arts à Londres). Les deux lots phares sont un rare bronze d’Alberto Giacometti, Femme debout, datant de 1951-1952, à l’expressionnisme franc et poétique (2,5/4 M€), et une toile de Picasso de 1909, Femme nue à la guitare (1,2/1,8 M€). La collection illustre les grands courants artistiques modernes – cubisme, surréalisme, art conceptuel, art brut, École de Paris – avec des œuvres de Jean Dubuffet, Max Ernst, Nicolas de Staël, Serge Poliakoff, Alexander Calder, Pierre Soulages ou encore Piero Manzoni.
Alberto Giacometti (1901-1966), Femme debout, vers 1952. Bronze, H. 58,8 cm. Estimé : 2,5/4 M€. Photo service de presse. © Adagp, Paris, 2025
Vente Paris, Sotheby’s, le 10 avril 2025 à 16h. www.sothebys.com