Chartres : la cathédrale a 1000 ans !

Le projet de jardin médiéval devant la cathédrale de Chartres.

Le projet de jardin médiéval devant la cathédrale de Chartres. © Super 8, Jean-Christophe Rousseau, Michel Cantal Dupart

En 1024, l’évêque Fulbert annonce au duc d’Aquitaine qu’il a achevé la construction de la cathédrale basse. Chartres fête donc le millénaire de cette église inférieure, crypte de la cathédrale actuelle. Cet anniversaire a été l’occasion d’un projet ambitieux de réaménagement de l’esplanade de la cathédrale, conduisant à des recherches archéologiques fructueuses, en particulier à la redécouverte du passé gallo-romain de la ville.

Le réaménagement de la partie de la ville correspondant aux limites de l’ancien cloître, soit 5 ha, est en cours pour en faire un lieu dédié à la découverte patrimoniale de Chartres. Ces travaux, commencés en 2023, sont prévus jusqu’en 2026 avec pour point final l’installation d’un parcours muséographique. Entre-temps les fouilles sont menées par C’Chartres Archéologie, la Direction de l’archéologie de Chartres métropole, aux abords de la cathédrale, en suivant la progression du chantier.

Les sépultures de l’hôtel-Dieu

Outre les occupations médiévales, avec des caves de maisons canoniales mises au jour depuis janvier 2023, les recherches ont livré des sépultures sous la salle Saint-Côme de l’hôtel-Dieu (attesté au XIe siècle et détruit en 1868), dans la zone d’inhumation réservée. Dans ce lieu, fouillé pour première fois, une soixantaine de squelettes a été dégagée sur les 300 à 400 potentiels. S’il s’agit sans doute de chanoines, il est aussi envi­sageable que des personnes fortunées y aient acheté des droits de sépulture afin de reposer au plus près de la cathédrale. Les défunts, inhumés dans des linceuls ou des cercueils, sont datés entre le XIIe siècle et le début du XVIIe siècle. Le mobilier est constitué de pots en terre cuite, des coquemars, contenant de l’encens en guise d’offrande.

Le trésor de la cathédrale réouvert

Fermé au public depuis le début des années 2000, le trésor des chanoines est présenté à nouveau dans la chapelle Saint-Piat du XIVe siècle. Environ 150 objets, la plupart destinés au culte, sont à découvrir. Parmi les très belles pièces : le tabernacle de Saint-Aignan, du XIIIe siècle, doté de plaques d’émaux de Limoges et une navette à encens du XVIe siècle. Plus rares, des wampums, colliers brodés de perles de coquillages offerts en ex-voto au XVIIe siècle par des tribus d’Amérique du Nord christianisées, les Hurons ou les Abénaquis.

Navette de Milles d’Illiers 1540.

Navette de Milles d’Illiers 1540. © DRAC CVL, F. Lauginie

Mettre au jour le centre civique antique

Mais ce sont les vestiges antérieurs, d’époque gallo-romaine, qui intéressent tout particulièrement les spécialistes. En effet, le quartier de la cathédrale se trouve au cœur de la ville romaine d’Autricum, fondée par Auguste. Délimitée par un grand fossé qui circonscrit 300 ha, la cité est conçue selon une trame urbaine originale avec des axes orientés à 45° par rapport aux points cardinaux. Les deux principaux, le cardo et le decumanus, se croisaient au niveau de l’angle sud-ouest de l’église actuelle. C’est d’ailleurs sur l’édifice civique monumental gallo-romain, centre du pouvoir local, qu’ont été édifiées les cathédrales successives, et dès le Ve siècle, peut-être, pour la première.

Mais de quoi ce centre civique était-il composé ? C’est l’énigme à laquelle l’équipe des archéologues tentera de répondre au cours de la campagne programmée qui commencera courant 2025, sous l’esplanade. Pour le moment est attesté un grand bâtiment doté d’un immense portique, se développant d’est en ouest, localisé sur la partie est de la butte. Le forum se trouvait, lui, vers le nord, au niveau du quartier actuel de la cité judiciaire où des investigations, conduites dans les années 1960, ont permis d’en découvrir les structures.

Fouilles réalisées par le service archéologique de la ville de Chartres, dans le cadre du chantier de réaménagement du cloître de la cathédrale Notre-Dame.

Fouilles réalisées par le service archéologique de la ville de Chartres, dans le cadre du chantier de réaménagement du cloître de la cathédrale Notre-Dame. © Ville de Chartres, Groupement Martino

La fouille de 1990-1992

Quant aux opérations menées en 1990-1992, sous l’esplanade, elles avaient dévoilé, dans la partie ouest, un grand bâtiment à cryptoportique, avec d’importantes élévations conservées, une cour centrale entourée d’un couloir semi-enterré et des boutiques accolées, s’inscrivant dans le complexe civique monumental mais dont la fonction précise reste à interpréter.

L’enjeu des recherches à venir est de réouvrir la grande fouille de 1990-1992, de dégager davantage les vestiges de ce bâtiment à cryptoportique du début du IIe siècle, de descendre à 6 m de profondeur, puis de pousser les sondages vers le nord, dans des zones encore non étudiées afin de mieux comprendre le plan d’ensemble. Par ailleurs, des prospections géophysiques au radar seront effectuées, notamment dans le sol de la crypte, afin d’identifier un potentiel mur gallo-romain. Ces découvertes seront ensuite intégrées au projet d’aménagement de l’esplanade de la cathédrale grâce à un parcours de visite mettant en connexion sous-sol et surface.

Exposition de sculptures au musée des Beaux-Arts

Le musée des Beaux-Arts présente plusieurs expositions. L’une d’elles témoigne de la richesse, de la diversité et du raffinement de la sculpture chartraine, du XIe siècle au XVIIIe siècle avec des fragments de statues colonnes du premier gothique du XIIe siècle, des statuettes gothiques du XIIIe siècle dans le style Saint-Louis ou des éléments du tour de chœur de la cathédrale réalisés au XVIe siècle. S’y ajoute une sélection de manuscrits enluminés des XIe, XIIe et XIIIe siècles, créés par le célèbre scriptorium de la cathédrale de Chartres, détruits partiellement par l’incendie de 1944 puis restaurés.

« 1 000 ans de sculptures à Chartres », du 21 septembre 2024 au 16 février 2025 au musée des Beaux-Arts. Tout le programme des expositions et conférences, du 21 septembre 2024 au 3 août 2025, sur le site : www.chartres.fr/1000-ans