La cathédrale de Chartres dévoile enfin tous ses trésors

Au niveau inférieur, la salle capitulaire présente des fragments du jubé médiéval et accueille les vitraux de Bang Hai Ja.

Au niveau inférieur, la salle capitulaire présente des fragments du jubé médiéval et accueille les vitraux de Bang Hai Ja. © Drac CVL, F. Lauginie

Après 23 ans de fermeture, 7 ans de travaux et 6 millions d’euros investis par l’État, le Trésor de Chartres a rouvert grand ses portes le 21 septembre dernier. Quelque 150 châsses reliquaires, sculptures, triptyques et joyaux de l’orfèvrerie liturgique sont désormais réunis dans la chapelle Saint-Piat, magnifiquement restaurée pour l’occasion. Une renaissance à la hauteur des attentes !

Au fil des vingt dernières années, la cathédrale fait l’objet d’une progressive métamorphose sous la houlette de la Drac Val-de-Loire. Dès les abords qui viennent d’être partiellement repavés, le changement est évident, et une fois qu’on pénètre dans Notre-Dame, les nombreuses campagnes de restauration (murs, vitraux, orgues…) sautent aux yeux, surtout lorsqu’on arrive dans le transept : le bras droit, actuellement en travaux, témoigne en effet de l’état d’encrassement passé de l’édifice et ne rend que plus évidente l’ampleur du travail accompli. Point d’orgue de la visite, le tour de chœur composé de quarante scènes (1529-1719) enchâssées dans une véritable dentelle de pierre a retrouvé son éclatante blancheur en 2022.

« C’est dans cet exceptionnel écrin aménagé dans le respect du lieu qu’ont pris place quelque 150 œuvres ou ensembles restaurés pour l’occasion, parmi lesquels figurent des acquisitions récentes et des dépôts majeurs consentis par le Louvre ou des communautés religieuses. » 

Une chapelle pour écrin

Dernier volet de cette série de chantiers, et non des moindres : la restauration de la chapelle Saint-Piat a permis de rendre toute sa splendeur à ce joyau du XIVe siècle, situé au chevet de la cathédrale. Géré par le Centre des monuments nationaux, le Trésor qui était auparavant cantonné à la chapelle haute se déploie désormais sur les deux niveaux. Le parcours débute à l’étage où l’on admire un bel ensemble de vitraux datant principalement de la construction. Les fresques ont en revanche disparu : « nous nous sommes contentés de parsemer les voûtes blanches d’un discret motif étoilé caractéristique de cette époque », confie Marie-Suzanne de Ponthaud, architecte en chef des Monuments historiques. A contrario, dans la chapelle basse, un exceptionnel cycle peint vers 1320 a pu être mis au jour. Malgré les détériorations, on distingue nettement la plus ancienne représentation de la cathédrale, immortalisée au cours de sa construction, en présence de la Vierge, comme le veut la légende. Les quatre baies étant occupées par de simples verres losangés, un concours lancé en 2018 a permis à la Coréenne Bang Hai Ja (1937-2022) de créer d’éblouissantes verrières abstraites qui soulignent le caractère mystique du lieu.

L’étage supérieur de la chapelle Saint-Piat.

L’étage supérieur de la chapelle Saint-Piat. © Drac CVL, F. Lauginie

Un florilège de trésors

C’est dans cet exceptionnel écrin aménagé dans le respect du lieu (une discrète tribune a été créée au fond de la nef pour accéder aux deux tourelles) qu’ont pris place quelque 150 œuvres ou ensembles restaurés pour l’occasion, parmi lesquels figurent des acquisitions récentes et des dépôts majeurs consentis par le Louvre ou des communautés religieuses. Ardemment vénérée à Chartres et représentée près de 170 fois dans la cathédrale, Notre Dame est bien sûr en majesté dans le Trésor où le visiteur est accueilli par une sculpture polychrome de la Vierge à l’Enfant (milieu du XVIe siècle). Si la Sancta Camisia, précieuse relique du voile de la Vierge offerte par Charles le Chauve, demeure dans le chœur de la cathédrale, elle est tout de même évoquée au fil du parcours. On admire notamment le luxueux textile moyen-oriental dit « voile de l’impératrice Irène » qui l’enveloppait, et divers présents témoignant de la ferveur des pèlerins (les simples ex-votos en forme de chemisette côtoient des armures royales médiévales ainsi que d’étonnants colliers de coquillages offerts au XVIIe siècle par les Hurons et les Abénaquis d’Amérique du Nord).

Tabernacle de Saint-Aignan, émaux de Limoges, vers 1220.

Tabernacle de Saint-Aignan, émaux de Limoges, vers 1220. © Drac CVL, F. Lauginie

Un édifice à l’histoire mouvementée

À travers les pièces d’orfèvrerie, autels portatifs et parements liturgiques, le Trésor dévoile un panorama de l’art religieux mais laisse aussi entrevoir l’histoire mouvementée de la cathédrale, car les collections se sont formées au gré de dons, de saisies et de destructions (incendies, Révolution). Le visiteur découvre ainsi les statues-colonnes du portail royal de Notre-Dame qui ont été déposées dans les années 1970, un éblouissant triptyque brodé de la fin du XIVe siècle, l’unique retable d’Ancien Régime de la cathédrale encore conservé, ainsi qu’un florilège de pièces d’orfèvrerie allant du Moyen Âge au XXe siècle ; mentionnons parmi ces merveilles le rarissime tabernacle de Saint-Aignan en émaux de Limoges datant des années 1220, plusieurs calices du Parisien Nicolas Loir, et des œuvres de Goudji.

Année jubilaire

Enfin, si vous cherchiez une raison supplémentaire de (re)découvrir la cathédrale de Chartres et son Trésor, Notre-Dame célèbre jusqu’au 15 août 2025 le millénaire de la crypte édifiée par l’évêque Fulbert, la plus longue de France avec ses 250 mètres ! Une exposition retrace ainsi l’histoire de cet édifice roman et les temps forts du pèlerinage à Chartres ; l’année sera aussi rythmée par des concerts et des conférences. Un appel aux dons est également lancé pour embellir la crypte et ses onze chapelles, il permettra la restauration de tableaux et de trois maquettes montrant l’évolution de la cathédrale au fil des siècles, la commande de mobilier liturgique et d’un vitrail, l’achat de bancs et la mise en place d’un nouvel éclairage destiné à magnifier les lieux.

Cathédrale Notre-Dame de Chartres, 28000 Chartres. Tél. 02 37 21 22 07.