Notre‑Dame de Paris restaurée (11/12). Le décor peint de la cathédrale

Jean Jouvenet, La Visitation, dit aussi Le Magnificat, 1716. Huile sur toile, 432 x 441 cm. Paris, musée du Louvre, en dépôt à la cathédrale Notre-Dame de Paris. © P. Lemaître. All rights reserved 2024 / Bridgeman Images
L’histoire du décor peint de la cathédrale de Paris est comme une pièce en plusieurs actes. Si le XVIIe siècle en fut l’âge d’or, avec les prestigieux mays de Notre-Dame, dont les treize toujours en place viennent de faire l’objet d’une restauration spectaculaire, les murs de l’édifice n’ont jamais été nus, et chaque époque, par goût ou par nécessité, a laissé sa marque dans cette longue histoire.
Le visiteur qui entrait dans la cathédrale Notre-Dame de Paris à la veille de la Révolution avait une impression très différente de celle que nous pouvons avoir aujourd’hui. Après plusieurs siècles d’aménagements successifs, de modifications dues aux changements de liturgie mais aussi de goût, la cathédrale gothique était alors en grande partie occultée par une multitude d’œuvres et d’éléments décoratifs qui avaient pris progressivement place sur ses murs. Aux côtés des meubles, objets et sculptures, c’est la peinture qui dominait le décor. Les tableaux présents dans la cathédrale étaient notamment le reflet de l’importance prise par l’usage des images peintes dans la communication de l’Église entre la fin du XVIe siècle et le XVIIIe siècle.
« Ces décors avaient déjà pris la place de ceux des premiers temps, au Moyen Âge, presque entièrement disparus. »
De ces trois siècles, c’est le XVIIe qui s’imposait et marquait alors l’apogée des efforts pour l’ameublement de la cathédrale. Ces décors avaient déjà pris la place de ceux des premiers temps, au Moyen Âge, presque entièrement disparus. Ils allaient à leur tour subir une très forte modification avec la nouvelle ère ouverte par la Révolution. Dans le procès-verbal dressé le 18 novembre 1790, ce sont plus de 220 tableaux qui sont inventoriés dans l’édifice et ses dépendances. À peine six ou sept ans plus tard, Alexandre Lenoir n’en mentionne plus que 67, conservés au dépôt des Petits-Augustins. Vidée de ses trésors, la cathédrale en retrouve progressivement des échantillons au cours des XIXe et XXe siècles. En parallèle, elle se couvre de son dernier décor peint, longtemps négligé et aujourd’hui en partie détruit, réalisé lors du chantier de restauration mené par Viollet-le-Duc. C’est un bref résumé de ces trois « temps de peinture » que nous allons retracer ici.
Les rares vestiges des XIVe et XVe siècles
Lorsqu’on évoque la peinture à Notre-Dame, c’est essentiellement le XVIIe siècle qui s’impose à notre imagination. Si cette impression est bien le reflet d’un âge d’or de la peinture dans la cathédrale, il ne faut pas oublier que durant les siècles précédents l’édifice ne se présentait pas totalement nu aux fidèles. Certains murs et voûtes arboraient de vives couleurs comme dans tant d’autres cathédrales médiévales. Les tableaux, certes moins nombreux que par la suite, devaient également s’y trouver déjà. Les collections de l’école des Beaux-Arts de Paris et celles du musée de Cluny conservent deux rares vestiges de ces peintures de la fin du Moyen Âge. Le premier, longtemps oublié, a été identifié en 1999. Il s’agit d’un retable montrant une Trinité aux chanoines (vers 1440), que l’on s’accorde aujourd’hui à attribuer au Maître de Dunois actif entre 1435 et 1466. De format allongé, le tableau décorait à l’origine un autel de la chapelle dédiée à la Trinité. Témoignage exceptionnel de la peinture parisienne du XVe siècle, il est désormais restauré et facilement visible grâce à son dépôt en 2024 au musée de Cluny.
Le second, arrivé dans ce même musée en 1985 grâce à un dépôt du Louvre, est le surprenant Portrait de la famille Jouvenel des Ursins. Peint entre 1445 et 1449, ce long panneau se trouvait dans la chapelle de la puissante famille dans le chœur de Notre-Dame, à proximité de leurs statues priant (toujours en place).
Maître de Dunois, La Sainte Trinité, dit aussi La Trinité aux chanoines, vers 1440. Peinture sur bois, 68 x 179 cm. Paris, École nationale supérieure des beaux-arts, en dépôt au musée de Cluny – musée national du Moyen Âge, Paris. © Beaux-Arts de Paris, dist. RMN / image Beaux-Arts de Paris
Le décor de la chapelle Saint-Nicaise
À ces deux « rescapés » il faut ajouter une œuvre encore plus rare : la peinture du tombeau à enfeu de l’évêque Simon Matifas de Bucy (1290-1304), qui se trouve toujours à son emplacement initial dans la chapelle Saint-Nicaise (mur sud) dans le chœur de la cathédrale. Les descriptions du XVIIIe siècle mentionnent à cet emplacement une Résurrection sur bois, grand tableau donné à un artiste actif autour de 1600 (Martin de Héry). Dissimulée, la peinture murale a ainsi été protégée. Elle représente Matifas de Bucy et saint Nicaise en prière de part et d’autre de la Vierge à l’Enfant qui bénit le défunt. La colonne qui se trouvait à l’entrée de la chapelle ainsi que le tombeau de l’évêque se trouvent également dans la cathédrale.
Vierge à l’Enfant trônant entre saint Nicaise et l’évêque Simon Matifas de Bucy, élément du tombeau de l’évêque Simon Matifas de Bucy (mort en 1304). Peinture murale. Paris, cathédrale Notre‑Dame, chapelle Saint-Nicaise. © P. Lemaître. All rights reserved 2024 / Bridgeman Images
Lorsque Viollet-le-Duc entreprend sa grande restauration, cette peinture murale est déjà un unique vestige peint du décor médiéval de l’édifice. Conservée, elle est alors lourdement « restaurée », c’est-à-dire repeinte, par Charles Désiré Maillot. Disparaissant dans le décor du XIXe siècle qui l’environne et située dans un espace peu accessible du chœur (réservé à la prière), l’œuvre tombe dans l’oubli. Sa restauration en 1994-1995 et le retrait d’une grande partie des repeints ont permis de mettre au jour les vestiges de l’œuvre originale qui était jadis entourée d’une architecture disparue. Malgré son état, la composition, datable du début du XIVe siècle, demeure la plus ancienne et la plus importante peinture murale du Moyen Âge conservée aujourd’hui à Paris.
Le Grand Siècle au décor des chapelles
Au XVIIe siècle, à l’image des autres églises catholiques d’Europe, Notre-Dame change de visage et accueille progressivement une nouvelle « collection » de peintures. Les commandes sont nombreuses et peuvent se diviser en plusieurs groupes : le premier comprend les tableaux commandés pour l’ornementation des chapelles latérales ; le second regroupe la prestigieuse série des mays dont la réalisation s’étend sur tout le siècle ; le troisième réunit les diverses peintures liées au renouveau du décor du chœur commencé par Louis XIII et terminé par Louis XIV. Les tableaux des chapelles latérales, du moins ceux aujourd’hui connus, ont pour une grande majorité été réalisés dans la première moitié du XVIIe siècle. On y retrouve de grands noms de la peinture des années 1630-1640 tels que Nicolas Poussin, les frères Le Nain, Lubin Baugin ou encore Philippe de Champaigne. Les anciens inventaires nomment également d’autres artistes tels Vouet ou Vignon, dont les peintures ont disparu.
Les frères Le Nain
Mentionné au XVIIIe siècle dans la chapelle Saint-Augustin, La Naissance de la Vierge était autrefois, avec Saint Michel dédiant ses armes à la Vierge (Nevers, église Saint-Pierre), dans la chapelle Saint-Antoine-et-saint-Michel, l’un des rares retables conservés des frères Le Nain à Paris. Dans le domaine de la peinture religieuse, c’est dans les tableaux de ces derniers que se manifeste le mieux la quête du réel qui animait certains artistes de la première moitié du XVIIe siècle. Cette nouvelle voie, certainement liée aux innovations caravagesques et à la diffusion de la peinture de genre flamande en France, venait enrichir une scène artistique où étaient actifs des peintres tels que Vouet, Vignon ou Blanchard. L’étroite collaboration des frères Le Nain et la signature sans prénom de leurs œuvres ne permettent pas encore de bien distinguer quelle était l’activité précise de chacun d’eux. On considère toutefois que l’essentiel des compositions destinées à Notre-Dame est de la main d’Antoine, l’aîné des trois frères.
Louis et Mathieu Le Nain, La Naissance de la Vierge, vers 1642. Huile sur toile, 220 x 145 cm. Paris, église Saint-Étienne-du-Mont, COARC, dépôt dela Ville de Paris à la cathédrale Notre-Dame de Paris. © DRAC Île de France – D. Bordes
Lubin Baugin
De tous les artistes présents à la cathédrale, c’est certainement Lubin Baugin qui remportait la palme du nombre d’œuvres avec plus d’une dizaine de peintures. Deux d’entre elles ont retrouvé leur place dans l’édifice : Le Martyre de saint Barthélemy, déposé en 1958 par le musée des Beaux-Arts de Rouen qui l’avait reçu après la Révolution, et l’émouvante Pietà, l’un des chefs-d’œuvre de l’artiste, retrouvée en 1958 à l’hospice de Saint-Cloud. On pourra admirer ailleurs à Paris, à l’église Saint-François-Xavier et dans la sacristie de l’église des Billettes, une Vierge à l’Enfant avec saint Jean-Baptiste et sainte Geneviève et un Christ en croix qui ornaient autrefois Notre-Dame. À son ouverture, le musée du Grand Siècle présentera quant à lui La Mort de saint Laurent de même provenance. Quant au tableau de jeunesse de Poussin, La Mort de la Vierge, et au Saint Léonard refusant les présents du roi Clovis de Jean-Baptiste de Champaigne, ils ont quitté pour toujours la France après la Révolution. Depuis leur envoi sous le Premier Empire, ils se trouvent à l’église Saint-Pancrace de Sterrebeek en Belgique, pour le premier, et au musée d’Art et d’Histoire de Genève, pour le second.
Lubin Baugin, La Vierge de pitié, vers 1645-55. Huile sur toile, 220 x 144 cm. DRAC Île-de-France ; Paris,cathédrale Notre-Dame. © DRAC Île de France – D. Bordes
Le triomphe de la peinture : les mays
La série de peintures la plus célèbre de Notre-Dame demeure celle des fameux mays. Autour de 1700, si un visiteur voulait avoir un aperçu complet de la peinture parisienne du XVIIe siècle, c’est ici qu’il devait se rendre. La cathédrale présentait alors des œuvres importantes de presque tous les peintres d’histoire les plus renommés. Cette « collection » était en grande partie le fait d’une offrande pieuse, celle du may, instituée par la puissante et riche corporation des orfèvres. Cette tradition avait été instituée au XVe siècle par la confrérie Sainte-Anne-et-Saint-Marcel des orfèvres. Il s’agissait alors d’offrir, tous les ans, au mois de mai, un présent à la Vierge – initialement un « arbre vert ». À partir de 1482, l’arbre fut remplacé par un petit édicule hexagonal appelé « tabernacle du may ». Six poèmes y étaient suspendus en l’honneur de la Vierge, accompagnés de tableautins. De 1608 à 1630, la corporation, dont les membres entretiennent des liens avec le milieu artistique, institue la commande d’une peinture, appelée aujourd’hui « petit may ». Celle-ci est présentée dans un nouveau tabernacle de forme triangulaire, suspendu dans la nef. La nature du may change une nouvelle fois en 1630 : ce sont désormais de grands tableaux aux sujets empruntés majoritairement aux Actes des Apôtres. Cette nouvelle formule court jusqu’en 1707, année du dernier may de Notre-Dame.
Jacques Blanchard, La Descentedu Saint-Esprit, 1634. Huile sur toile, 340 x 245 cm. DRAC Île-de-France ; Paris, cathédrale Notre-Dame. © DRAC Île de France – D. Bordes
De jeunes artistes prometteurs
Le peintre, choisi par les orfèvres, a parfois déjà une renommée – c’est le cas de Georges Lallemant, Claude Vignon ou Jacques Blanchard –, mais le plus souvent, c’est un jeune artiste prometteur en début de carrière, comme pour Laurent de La Hyre ou Charles Le Brun. Pour la plupart d’entre eux, il s’agit d’un moment clef de leur carrière : une composition monumentale dont le mode d’exposition dans la cathédrale leur assure une extraordinaire visibilité et peut de ce fait susciter de nombreuses commandes. L’enjeu que représente l’obtention d’un may explique l’application que les peintres mettent à sa réalisation, précédée de dessins préparatoires et d’esquisses peintes. La plus aboutie de ces esquisses, un modello, doit être soumise à l’approbation du chapitre de la cathédrale, qui peut suggérer des modifications iconographiques ou formelles. Le peintre doit également, à partir de 1630, exécuter une réplique réduite de son may pour chacun des deux orfèvres qui en ont la charge financière.
Laurent de La Hyre, La Conversion de saint Paul, 1637. Huile sur toile, 323 x 235 cm. Paris, église Saint-Thomas-d’Aquin, COARC, dépôt de la Ville de Paris à la cathédrale Notre-Dame de Paris. © DRAC Île de France – D. Bordes
On perçoit en étudiant la série des compositions les changements de goût et les mutations à l’œuvre dans la peinture religieuse au cours du XVIIe siècle. Les scintillements de la peinture caractéristiques de l’époque de Louis XIII (chez J. Blanchard, La Hyre, Aubin Vouet, Charles Poerson) cèdent peu à peu la place à un art classique parisien qui prend son essor dans les années 1640-1650 (avec Bourdon, Loir, Le Brun) et s’épanouit ensuite sous le règne de Louis XIV (sous les pinceaux de Testelin, Chéron, G. Blanchard ou Elye).
De Louis XIII à Louis XIV : le décor du chœur
Parallèlement à la tradition des mays, qui masquent progressivement l’architecture gothique de la nef et du transept de la cathédrale, la rénovation du chœur s’accompagne de la création d’une série capitale de tableaux monumentaux dus aux plus grands artistes du XVIIe siècle. L’origine de ce chantier se trouve dans le vœu fait en 1636 par Louis XIII, dont le renouvellement en 1638 aboutit à la commande d’un décor pour le chœur de Notre-Dame. À cet effet Philippe de Champaigne exécute le monumental Vœu de Louis XIII (Caen, musée des Beaux-Arts), auquel viendront plus tard répondre les sculptures du nouvel autel dédié à la Vierge, dues à Nicolas et Guillaume Coustou. Toutefois, le principal morceau de peinture du chœur sera le décor des parties hautes.
« Ce décor marque le triomphe de la peinture. »
Le lieu est d’abord orné d’une spectaculaire tenture de tapisserie, avant que ses piliers ne soient recouverts de peintures dans le cadre du projet d’aménagement de Robert de Cotte. Ce décor marque le triomphe de la peinture. Au-dessus des nouvelles stalles, dans un encadrement de marbres blanc et rose et de bronzes dorés qui couvrent toute l’architecture gothique, huit grands tableaux commandés par le chanoine Antoine de La Porte sont placés de part et d’autre du chœur. Comme les mays, ces peintures consacrées à la vie de la Vierge masquent en grande partie les arcades et motifs gothiques de l’édifice. Les artistes convoqués sont tous issus de l’Académie royale de peinture et de sculpture : Charles de La Fosse (2), Jean Jouvenet (1), Claude Guy Hallé (1), Louis de Boullogne (2), Antoine Coypel (2).
Le chef-d’œuvre de Jouvenet
De l’éclat de cette suite, aujourd’hui dispersée, témoigne à Notre-Dame Le Magnificat de Jouvenet, ultime chef-d’œuvre de l’artiste terminé en 1716, un an avant sa mort. Lorsque Jouvenet signe son tableau, Louis XIV est mort depuis un an. S’ouvre alors le nouveau siècle avec lequel se termine la seconde phase de la transformation de la cathédrale commencée à la fin du XVIe siècle. L’apport du siècle des Lumières en termes de peinture est relativement modeste à Notre-Dame, surtout au regard de la période précédente. Tandis que quelques rares toiles viennent enrichir les chapelles, comme Saint Charles Borromée donnant la communion aux pestiférés (1743) ou encore Le Martyre de sainte Catherine de Joseph Marie Vien (1752), toutes demeurées en place, d’autres, comme les tapisseries et leurs cartons peints ou certains mays, quittent l’édifice.
Les mays, un trésor dispersé
À la Révolution, l’ensemble de soixante-seize tableaux que constituent les mays est déposé au Muséum central des arts (futur musée du Louvre) avant d’être progressivement dispersé. Au début du XIXe siècle, la décision est prise d’en replacer certains à Notre-Dame alors que d’autres gagnent les réserves du Louvre. En 1863, les œuvres accrochées à la cathédrale retournent également au musée pour laisser place aux décors muraux de Viollet-le-Duc. La localisation actuelle de la plupart des cinquante-deux tableaux aujourd’hui retrouvés est le fruit d’une nouvelle distribution aux XIXe et XXe siècles. Après 1945, treize mays regagnent Notre-Dame dans le cadre du remeublement de la cathédrale mené par Jean-Marie Auzas1. Leur retour s’accompagne de la destruction des décors peints de Viollet-le-Duc dans les chapelles de la nef. Au terme du vaste chantier qui s’achève, les mays de Notre-Dame, ainsi que neuf autres tableaux ornant les chapelles, ont retrouvé leur éclat ; ils seront de nouveau visibles in situ à partir du 8 décembre 2024.
Charles Le Brun, La Lapidation de saint Étienne, 1651. Huile sur toile,400 x 312 cm. Paris, musée du Louvre, en dépôt à la cathédrale Notre-Dame de Paris. © DRAC Île de France – D. Bordes
1 Signalons que quatorze mays se trouvent aujourd’hui au musée des Beaux-Arts d’Arras et huit au musée du Louvre.
Les saisies napoléoniennes
Après la Révolution, qui a vidé Notre-Dame de ses tableaux, des travaux d’embellissement ponctuels sont menés sous l’Empire et la Restauration. Quelques rares œuvres, qui ont quitté depuis les lieux, sont commandées spécifiquement durant la Restauration et plusieurs peintures, provenant des saisies napoléoniennes en Italie ou d’autres églises parisiennes, y prennent place. C’est ainsi qu’une toile du Guerchin, La Gloire de tous les saints (dont seuls deux fragments subsistent), le Saint Bernardin de Sienne délivrant la ville de Carpi de Ludovic Carrache ou le monumental Triomphe de Job de Guido Reni arrivent à Notre-Dame à l’occasion du Te Deum de 1802.
Guido Reni, Le Triomphe de Job, dit aussi Job rétabli dans sa prospérité, 1636. Huile sur toile, 410 x 270 cm. DRAC Île-de-France ; Paris, cathédrale Notre-Dame. © DRAC Île de France – D. Bordes
Viollet-le-Duc : repeindre Notre-Dame
À ces menus ajustements succède la grande rénovation de Viollet-le-Duc. Une fois la réfection du bâtiment terminée, l’architecte restitue la polychromie de l’édifice en créant des décors peints pour toutes les chapelles. Ceux-ci sont exécutés d’après ses cartons entre 1864 et 1868. Si ceux de la nef ont été détruits au XXe siècle, les chapelles du chœur conservent encore leurs peintures. Celles-ci, comme l’explique l’architecte lui-même dans une publication illustrée qu’il leur consacre en 1870, sont entièrement au service de l’architecture qu’elles doivent souligner et servir. Les scènes et figures y occupent une place relativement réduite, laissant se déployer des motifs décoratifs néogothiques. À la différence des entreprises picturales du XVIIe siècle, qui s’imposaient en masquant l’architecture, celle de Viollet-le-Duc, inversement, fait corps avec l’édifice et en souligne la beauté médiévale.
Une chapelle de Notre-Dame au décor peint d’après des cartons d’Eugène Viollet-le-Duc, 1864-68. Photo prise à la fin du chantier de restauration de 2019-2024. © Magnum Photos – P. Zachmann
Après la Seconde Guerre mondiale, grâce à l’action de Jean-Marie Auzas, la cathédrale, qui ne présentait depuis les travaux de Viollet-le-Duc plus aucun tableau, récupère quelques-unes de ses anciennes œuvres. C’est celles-ci que nous pouvons y admirer aujourd’hui aux côtés des décors du XIXe siècle : un échantillon de la fabuleuse fabrique de peinture que fut jadis Notre-Dame.
Vingt-deux des vingt-cinq tableaux de la cathédrale, dont treize mays, ont été restaurés entre 2021 et 2023 par la Conservation régionale des monuments historiques de la DRAC d’Île-de-France, avec le soutien du C2RMF, du musée du Louvre et de la COARC de la Ville de Paris.