Les trésors du Kazakhstan s’exposent au musée Guimet

Vue de l’exposition.

Vue de l’exposition. © Lola Moser

Bénéficiant de prêts exceptionnels, venus du musée national de la République du Kazakhstan et de la réserve historique et culturelle d’État – musée Azret Sultan, le musée national des arts asiatiques-Guimet déploie cinq ensembles de chefs-d’œuvre sculptés et orfévrés, éclairant des moments fondateurs de l’histoire millénaire de l’Asie centrale.

Dans une scénographie immersive qui donne à voir (et à entendre) les paysages des immenses steppes d’Asie centrale, se dévoilent cinq trésors nationaux du Kazakhstan. Remontant au IIIe ou au IIe millénaire avant notre ère, le plus ancien, une bien singulière statue en grès brun soigneusement poli, est surnommé « le Penseur de Tobyl » en référence à l’œuvre de Rodin et au site où elle a été mise au jour. Mais ses larges orbites profondément creusées et tournées vers les cieux lui ont aussi valu le sobriquet de « l’homme scrutant le ciel ». La virtuosité de la sculpture montre autant une profonde connaissance de l’anatomie qu’une volonté de stylisation, dans un rejet délibéré du respect des proportions. Et au-delà, elle témoigne également d’un changement du mode de vie des tribus de chasseurs nomades vers une économie productive reposant désormais sur l’élevage du cheval et des bovins, considérée comme le fondement de la civilisation des step­pes.

Le Penseur de Tobyl. Région de Qostanaï, IIIe-IIe millénaires avant notre ère, grès. Musée national de la République du Kazakhstan.

Le Penseur de Tobyl. Région de Qostanaï, IIIe-IIe millénaires avant notre ère, grès. Musée national de la République du Kazakhstan. Musée national de la République du Kazakhstan.

Le raffinement de l’orfèvrerie scythe

Sertis dans une vitrine qui leur est dédiée, de somptueux ornements en or, découverts en 1969 à Issyk, dans la région d’Almaty et datés du IVe ou du IIIe siècle avant notre ère, soulignent, quant à eux, le raffinement de l’orfèvrerie des Scythes et la richesse de leur mythologie. Destinés à orner une coiffe de souverain, ils se parent de motifs végétaux et animaliers, symbolisant les différentes parties du cosmos, et manifestent la puissance de « l’Homme d’or » sur la totalité de l’univers, en l’élevant au rang de divinité solaire.

Une confédération de tribus

Monuments emblématiques des tribus nomades turques du IXe au XIe siècle, les balbal, stèles anthropomorphes masculines ou féminines, offrent ensuite aux regards leurs traits schématiques. Leur présence réflète un moment décisif dans l’histoire de l’Asie centrale, alors dominée par des khaganats (empires), selon un mode de confédération des tribus qui émerge au VIe siècle. La puissance du célèbre émir Tamerlan est magnifiquement incarnée par ces grands chandeliers commandés pour le mausolée du poète et mystique soufi Ahmet Yasawi, promoteur de l’islam en Asie centrale. Imposantes pièces en bronze, sans doute incrustées d’or, d’argent ou de cuivre au XIVe siècle, elles attestent du faste de l’art décoratif islamique médiéval.

Motifs et couleurs

C’est dans ce même mausolée que sont expérimentées de nouvelles techniques architecturales, comme les briques bleues et turquoises émaillées de motifs géométriques employées plus tard dans la construction de Samarcande. Un chatoiement des couleurs, qui se retrouve jusque dans l’art textile avec un chapan, large manteau à pans croisés, en soie brochée de fils d’or et d’argent, orné de motifs végétaux symbolisant l’abondance et la prospérité et soulignant l’extrême raffinement des vêtements élitaires.

« Kazakhstan. Trésors de la Grande Steppe », jusqu’au 24 mars 2025 au musée national des arts asiatiques-Guimet, 6 place d’Iéna, 75116 Paris. Tél. 01 56 52 54 33 et www.guimet.fr